Relance de l’Accord d’Addis-Abeba : NTUMBA LUABA A LA MANOEUVRE

L’ultimatum lancé le 30 mai 2025 par un groupe de onze parlementaires européens emmenés par la députée belge Hilde Vautmans, achevant leur mission à Kinshasa et exigeant la réactivation de l’Accord d’Addis-Abeba de 2013, est un signe fort qui démontre une fois de plus lengagement de lUE dans la recherche dune paix définitive dans lEst de la RD Congo. A lissue de la mission Hilde Vautmans a déclaré « Trop cest assez ». LAccord-cadre demeure le texte de référence pour la stabilisation de la RD Congo.
Il faut saluer l’engagement inlassable d’Alphonse Ntumba Luaba, l’actuel Coordonnateur du Mécanisme National de Suivi, qui n’a ménagé aucun effort pour mobiliser l’attention de l’UE autour de l’Accord-Cadre, et pour ramener toutes les parties prenantes à la redynamisation de cet accord essentiel. Son dévouement et sa persévérance sont des atouts précieux pour la RD Congo dans cette période critique. La mobilisation menée par Alphonse Ntumba Luaba est une réponse à la fragmentation des médiations, de Luanda ou Nairobi, de Doha, des USA et du Togo. Cette fragmentation a eu un effet pervers en diluant les efforts, créé des chevauchements d’initiatives, et finalement, sapé la cohérence nécessaire à la recherche d’une solution globale. Chaque médiation, avec son propre agenda et ses propres acteurs, a fragmenté la réponse internationale, rendant difficile l’établissement d’une feuille de route unifiée et contraignante pour toutes les parties.
De plus, la récente approche bilatérale qui sarticule autour d’un deal minier contre protection sécuritaire entre la RD Congo et les USA, bien que potentiellement bénéfique à certains égards, s’inscrit mal dans l’esprit de l’Accord-Cadre d’Addis-Abeba. Ce dernier a été conçu comme un cadre multilatéral, impliquant un ensemble de garants internationaux précisément pour garantir une approche équilibrée et inclusive de la paix et de la sécurité durables pour la région. En marginalisant ces garants internationaux dans la recherche de solutions, une approche bilatérale risque de créer des frustrations, d’affaiblir la cohésion internationale et de compromettre la légitimité d’une solution pérenne.
Vers une Conférence des Garants Internationaux de l’Accord-Cadre (CGIA)
Les efforts menés par le Coordonnateur Alphonse Ntumba Luaba pour redynamiser laccord-cadre dAddis-Abeba et garantir des effets concrets sur le terrain aboutiront selon toute vraisemblance à lorganisation prochaine dune Conférence des Garants Internationaux de l’Accord-Cadre (CGIA) et de la RD Congo, qui pourrait être convoquée à linitiative du Président Félix-Antoine Tshisekedi. Cette première étape réunirait exclusivement la RD Congo et les Garants Internationaux, ONU, Union Européenne, États-Unis, France, Royaume-Uni et Belgique. L’objectif de cette première phase serait une évaluation conjointe et approfondie de la situation en RD Congo. La RD Congo aurait alors l’opportunité de présenter ses propres analyses et de faire des propositions concrètes. Au cur de ces propositions pourraient figurer l’élargissement de sa coopération minière à tous les garants internationaux. Cette démarche permettrait non seulement de dissiper les craintes d’approches bilatérales perçues comme exclusives, mais aussi de définir des solutions harmonisées pour le financement de la reconstruction des zones affectées par les conflits, le retour des déplacés et la réhabilitation des infrastructures, grâce aux revenus de la vente des minerais.
Cette conférence serait également l’occasion pour la RD Congo de s’enquérir de la nature du soutien de chaque garant dans la mise en uvre et la redynamisation des engagements de réformes prévus par l’Accord-Cadre. Il s’agirait d’identifier précisément les appuis sécuritaires, financiers, techniques et diplomatiques attendus de chaque partie.
Le rôle du Mécanisme National de Suivi
Dans cette redynamisation, suscitée par son Coordonnateur Alphonse Ntumba Luaba, le Mécanisme National de Suivi (MNS) de l’Accord-Cadre d’Addis-Abeba est appelé à jouer un rôle déterminant, après avoir été écarté longtemps de ses missions essentielles de réformes. Le MNS redeviendra la pierre angulaire pour les engagements de réforme de la RD Congo. Il devrait être renforcé et doté des moyens nécessaires pour une coordination nationale de la mise en uvre des réformes internes découlant de l’Accord-Cadre et assurer le suivi rigoureux des résolutions qui pourraient découler de la Conférence des Garants Internationaux de l’Accord-Cadre (CGIA). Cela inclut la surveillance des flux financiers liés aux minerais pour la reconstruction, le suivi du retour des déplacés, l’évaluation de l’efficacité des appuis des garants et la mise en chantier effective des réformes nationales, dont la préparation et la supervision incombent au MNS suivant l’Ordonnance n°13/020 du 13 mai 2013.
Les acteurs régionaux et la Société Civile
Une fois que les Garants internationaux et la RDC auraient établi une trajectoire claire assortie dengagements mutuels, il serait alors pertinent d’élargir le processus. Cela impliquerait la participation des acteurs régionaux (pays voisins et organisations régionales), et de la société civile congolaise. L’objectif serait de proposer une trajectoire aux objectifs partagés, afin d’obtenir l’adhésion de tous les acteurs concernés et de renforcer les missions du Mécanisme Régional de Suivi et de vérification sur le terrain.
L’ultimatum de l’UE est un signal clair : l’heure n’est plus aux tergiversations. L’approche multilatérale centrée sur l’Accord d’Addis-Abeba et impliquant activement ses garants internationaux, offre une voie crédible pour sortir de l’impasse. Elle permettrait non seulement de mobiliser des ressources, mais aussi de tracer les grandes lignes du futur avec la garantie du poids diplomatique des Garants internationaux de lAccord-cadre, en s’assurant que les richesses minières de la RDC profitent enfin à son peuple, en finançant la reconstruction et la paix.