Pour Ngobila et la gouvernance des provinces

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Face aux différents maux qui accablent Kinshasa, plusieurs réactions sont possibles. Un opposant pourrait brandir l’incompétence et l’incurie des animateurs urbains mais, à bien y regarder, les résultats mitigés obtenus par l’Hôtel de ville de Kinshasa peuvent s’expliquer par plusieurs causes, qui exonèrent partiellement les gestionnaires de la capitale. La principale de ces causes est la décentralisation inaboutie entrainant une sous- administration criante de la RDC, caractérisée dans toutes les provinces par une mauvaise coordination des services publics entre les chefs-lieux et les entités décentralisées. Ces retards dans la réalisation effective de la décentralisation ont favorisé une méconnaissance générale des notions fondamentales de gestion des villes et des municipalités.

1. Au plan organique
La réforme de 2008 introduite par la loi n°08/012 du 31 juillet 2008 sur la libre administration des provinces donne à la ville de Kinshasa le statut de province. Elle est subdivisée en communes et ces dernières sont subdivisées en quartiers. Kinshasa et ses communes sont dotées de la personnalité juridique et de la libre administration de leurs ressources humaines, économiques, financières et techniques.
Les communes de Kinshasa ont ceci de particulier qu’elles sont en relation directe avec les institutions provinciales sans l’échelon de la mairie qui existe dans les autres provinces.
Les animateurs communaux, les bourgmestres et leurs adjoints, sont nommés, les élections locales n’ayant jamais été organisés ce qui est contraire aux prescrits de la Constitution et à la réforme de 2008. L’autonomie des bourgmestres et le principe de libre administration des communes sont ainsi limités par ces nominations à caractère politique qui permettent aux bourgmestres d’échapper au principe de redevabilité vis-à-vis de leurs administrés. Nommés, les animateurs communaux sont à la merci de décisions politiques, incapables de se prévaloir du choix des électeurs.
Cette situation qui confirme l’inaboutissement de la décentralisation constitue une grave entorse à l’autonomie organique des communes telle que voulue par le constituant et par le législateur. Elle entraine une sous-administration chronique des communes de Kinshasa, leurs animateurs nommés préférant attendre les instructions de l’exécutif provincial plutôt que de faire preuve de responsabilité, or c’est précisément l’élection au suffrage universel direct qui permet d’organiser efficacement le fonctionnement des communes et l’absence de conseillers communaux élus isole les bourgmestres et leurs adjoints de leurs administrés.
Pour ces raisons, les communes ne sont pas véritablement fonctionnelles et par conséquent ne sont pas en mesure de gérer les affaires locales au bénéfice de leurs habitants. Elles se contentent d’appliquer vaguement les instructions de la province sans la réelle autonomie financière découlant du principe de libre administration, sans véritable budget ni pouvoir réel d’affectation des recettes à l’offre de services communaux, et finalement sans aucune responsabilité.
De plus, les nominations des bourgmestres et de leurs adjoints les inféodent aux parrains politiques qui ont proposé leurs nominations et à qui ils doivent un tribut régulier.
Il incombe à la CENI d’organiser les élections locales.
2. Au plan de la gouvernance provinciale
Kinshasa est composée de 24 communes dont le fonctionnement organique est paralysé par l’inaboutissement de la décentralisation, avec la nomination des animateurs communaux. Cette situation engendre une certaine caporalisation des autorités communales et l’absence de coordination des services publics entre les communes, qui doivent être assurés conformément à la loi organique n°16/001 du 3 mai 2016 portant organisation et fonctionnement des services publics du pouvoir central, des provinces et des entités territoriales décentralisées.
Or, l’article 3 de cette loi stipule que les services publics de la province comprennent : l’administration rattachée au Gouverneur de province ; l’administration de l’Assemblée provinciale ; l’administration des Ministères provinciaux, et précise en son article 4 que pour les entités territoriales décentralisées les services publics comprennent selon le cas : l’Administration des Conseils des villes, communes, secteurs et chefferies ; l’Administration des Collèges exécutifs des villes, communes, secteurs et chefferies.
Il apparait ainsi clairement que le législateur renvoie aux communes l’essentiel des services publics rencontrant les critères de proximité, d’accessibilité et de participation ou de consultation indiqués à l’article 15 de la loi susmentionnée, qui ne peuvent être réalisés efficacement au niveau des communes tant que leurs animateurs n’auront pas été élus conformément au principe de la libre administration des entités territoriales décentralisées. La lutte contre l’insalubrité et la police administrative pour le respect des lois et règlement entrent particulièrement dans cette catégorie de proximité.
Malheureusement, il faut déplorer que cette loi de 2016 définisse les services publics par métonymie au sens organique d’administrations publiques qu’elle se contente d’énumérer avec une certaine confusion entre administration publique et fonction publique, au lieu de les envisager comme des prestations de services d’intérêt général fournies par les administrations publiques nationales et provinciales ou par des agences déléguées avec des objectifs à atteindre.
De ce qui précède on observe que Kinshasa n’est pas gérée comme une ville moderne et ce fait est inhérent à l’inefficacité de son organisation administrative qui la fait ressembler à une jungle où tout est permis.
Cette situation découle de la mauvaise articulation de l’administration publique autour de ses trois fonctions principales : faire appliquer la loi ; réaliser la police administrative, qui est préventive, pour maintenir l’ordre public, la tranquillité des administrés et la salubrité publique ; gérer les services publics ou services d’intérêt général.

Ces fonctions sont mal remplies par l’administration publique de Kinshasa du fait de la faiblesse organique des administrations communales, entrainant une absence totale de mise en place des instruments de gestion moderne des villes.
C’est ainsi que de nombreuses critiques et interpellations ont été adressées à l’actuel Gouverneur de Kinshasa (Kabund, Mukebay etc.), mais il faut convenir que l’autorité urbaine n’est pas, en premier ressort, responsable de la situation actuelle, ni les gouverneurs dans les provinces.
La gestion des villes comprend la gestion de l’espace urbain, la gestion économique, la gestion administrative et la gestion des équipements et infrastructures.
Le laxisme dans la gestion de l’espace urbain à Kinshasa est évident quant au non-respect des normes d’implantation et de construction, mais là encore l’information devrait remonter des communes à l’autorité urbaine, or les communes ne sont pas réellement fonctionnelles.
Les marchés sauvages pullulent le long des rues, les bars se multiplient sans autorisations d’ouverture conformément à la destination des quartiers, résidentiels ou industriels, et occasionnent des tapages diurnes et nocturnes interdits par les lois et règlements qui sont sans cesse bafoués. Les étalages de fortune qui encombrent les rues réduisent la surface carrossable. Le désordre urbain est total.
L’insalubrité est générale et les mesures d’assainissement sont inefficaces. Les ordures s’amoncellent partout dans des décharges sauvages. Les balayages de rue que l’on voit ça et là consistent à repousser le sable sur les accotements des rues, d’où il revient continuellement sur la chaussée.
Les rivières sont polluées par des ordures flottantes et des matières plastiques non dégradables. Les habitats sont vétustes particulièrement dans les communes de la périphérie à forte densité démographique sans que les autorités communales n’imposent des mesures de rénovation aux propriétaires.
Pourtant l’administration dispose de la puissance publique et du privilège d’exécution d’office qui lui permet de prendre des décisions à l’encontre des administrés lorsque la situation l’exige pour faire respecter les lois et les règlements. Mais cette administration est réduite à néant sans une organisation effective de l’échelon communal.
Les plans d’occupation des sols qui sont d’une importance capitale pour la planification sont archaïques et datent de l’époque coloniale avec ses villes étalées occasionnant une forte consommation des sols et adaptées à une faible démographie. Le passage à la ville compacte utilisant les sols de manière plus intensive est nécessaire pour planifier les nouvelles infrastructures et contrôler l’explosion démographique. Les stratégies de construction doivent être réorientées vers l’érection de bâtiments à niveau pour réduire la consommation des sols.
La gestion économique de la ville de Kinshasa est défaillante, l’implantation des commerces n’obéit à aucune logique, la qualité de commerçant est acquise sans respect des formalités, la plupart des habitations résidentielles offrant des produits à la vente sans contrôle ni autorisations, les ventes à la criées et à la sauvette sont répandues dans toutes les rues. Le commerce pharmaceutique est autorisé au tout venant sans compétences spécialisées et avec des conséquences sur la santé publique. Des dispensaires de soins clandestins opèrent dans des parcelles à vocation résidentielle.
Les transports privés pullulent au détriment de la rationalisation des mouvements des usagers à travers le réseau routier alors que la profession de taxi devrait être limitée et encadrée. Ce secteur au service de la production et de la consommation est d’une importance cruciale pour l’économie de la ville mais la gestion du trafic est inexistante, ce qui entraine de graves perturbations quotidiennes préjudiciant l’économie de la ville.
Le fonctionnement organique des communes leur permettrait de réaliser les recettes nécessaires à la gestion de leurs territoires, elles ne remplissent actuellement qu’une fonction administrative limitée.
La gestion administrative de la ville de Kinshasa est gangrenée par la corruption, les registres de l’état-civil sont mal tenus et ne remplissent pas leur fonction dans la gestion des mouvements de la population et d’information statistique pour les politiques sectorielles. L’identification des ménages est inexistante alors qu’elle est la condition sine qua non pour une offre de services publics performants et la planification de la croissance urbaine.
Chaque commune devrait être dotée d’un plan de développement communal visant le développement local élaboré avec la participation des habitants pour fournir l’offre de services publics attendus par les populations en cohérence avec les orientations nationales.
Un plan communal d’urbanisme et d’occupation foncière devrait être élaboré pour chaque municipalité et les communes doivent être chargées directement de leur assainissement.
La gestion des infrastructures urbaine est lacunaire. En ce qui concerne la voirie, il semble que le gouvernement provincial ne reverse pas à l’OVD les 20% de recettes réalisées par la vente des vignettes tel que prévu par la loi fixant la nomenclature des taxes et impôts, ce qui réduit la capacité de cet office à réhabiliter la voirie urbaine, ne pouvant ainsi compter que sur les fonds versés par le FONER et par le programme Kinshasa Zéro Trous piloté par le gouvernement central.
La voirie secondaire est laissée à l’abandon ce qui provoque l’engorgement des voies principales et accélèrent leur dégradation.
Les bâtiments publics ne sont pas entretenus ni renouvelés suivant l’accroissement des usagers des services publics.
La mise en place des services non marchands, la fourniture d’eau et d’électricité, n’est pas coordonnée avec les opérateurs nationaux SNEL et REGIDESO et doit être repensée dans le cadre de l’intercommunalité.
En ce qui concerne la gouvernance provinciale, le sentiment général des kinois concernant la gestion de Kinshasa est que les taxes et impôts perçus n’offrent pas de contrepartie visible en termes de services publics. Les politiques sectorielles de la ville Kinshasa ne sont pas publiées.

3. Une piste de solution
Les défis à relever pour donner à Kinshasa le visage d’une ville bien administrée sont multiples. Cependant, des mesures simples peuvent contribuer à améliorer les gouvernances provinciale et communale et contribuer à une meilleure planification du développement harmonieux de la capitale.
Pour ce faire il convient d’utiliser de manière optimale les données de l’Etat-civil pour la planification des politiques sectorielles résultant de statistiques fiables et d’assurer pour ce faire l’identification des ménages qui sont les destinataires principaux des services publics à fournir à travers ces politiques sectorielles.
L’introduction du certificat de composition de ménage qui atteste de la composition des ménages indique les personnes domiciliées à la même adresse et qui font partie d’un ménage ainsi que leur lien familial éventuel avec la personne de référence du ménage.
En Belgique ce certificat est un instrument fondamental de gestion des populations et de leurs mouvements et se définit comme un extrait du registre de la population. Chaque commune doit tenir un registre des populations qui est un état des habitants contenant leurs noms, prénoms, lieu de naissance, dernier domicile, profession, métier et autres moyens de subsistance.
Cette obligation facilite non seulement les recensements, mais également la planification des politiques sectorielles. Cette dernière fonction est totalement inconnue en RDC ou l’Etat-civil se contente d’enregistrer les naissances et les décès, aucune commune n’étant à jour pour la tenue du registre de la population, qui comporte la liste des nationaux et des étrangers résidant sur son territoire.
Il va sans dire que les communes kinoises n’ont aucune maitrise des mouvements de population qui s’opèrent entre elles, ni celle des mouvements qui s’effectuent de province à province. Elles ne peuvent par conséquent réaliser aucune politique sectorielle locale faute d’éléments statistiques sur les destinataires de ces politiques.
Les registres de la population forment pour les administrations communales la source principale de renseignements qui peut être consultée quotidiennement dans le cadre de la gestion de leur population. L’enregistrement de la population consiste en un ensemble de données relatives à l’identification des personnes, à leur profession et à leurs occupations ainsi qu’à leur localisation.
Les registres de la population sont tenus sous la responsabilité des bourgmestres de chaque commune conformément à la loi et à la réglementation. La commune assure la collecte exhaustive des informations nécessaires à l’établissement des registres et vérifie la réalité de la résidence principale constituant le critère d’inscription ; l’actualisation des données s’effectue sur la base des déclarations des personnes inscrites ou à inscrire ainsi que d’après les actes d’Etat-civil ou les jugements et arrêts susceptibles d’influencer les informations reprises aux registres.
Le certificat de composition de ménage est donc un extrait succinct du registre de la population. Il se présente comme un document de format A4, timbré contre payement et signé par l’administration communale. Il est décerné sur demande par un membre du ménage pour présentation dans les administrations ou organismes publics ou privés à des fins diverses, dont le contrôle ou le recoupement des données personnelles de chaque administré.
Le « ménage » est constitué par les occupants d’un domicile à savoir :
– le/la chef de famille et conjoint
– personne isolée (étudiant, célibataire, pensionné, veuf)
– enfants à charge
– autres personnes à charge
– hébergés temporaires
cohabitant
Le certificat de composition de ménage précise :
– nom et prénom des occupants adresse exacte (rue, localité, commune, code postal) date (s) de naissance état-civil qualité (étudiant, ouvrier, chômeur, employé, commerçant, militaire, policier, étranger, réfugié etc.) numéro d’identification nationale de l’habitant, carte d’identité et/ou de passeport
Pour l’adaptation au contexte congolais peuvent être rajoutés :
– nombre de pièces à vivre du domicile (pour les services de l’hygiène et de l’habitat)
– numéro de carte d’électeur –
L’instauration du certificat de composition de ménage permettra une administration efficace des populations et offrira aux pouvoirs publics une vue d’ensemble des efforts sectoriels à fournir pour rencontrer les attentes de la population, ainsi que d’en contrôler et limiter les mouvements. En bonne administration tous les mouvements des habitants doivent être signalés à l’autorité communale et indiqués par elle au fichier central de la population, inexistant en RDC.
L’utilisation du certificat de composition de ménage permettra de connaître instantanément
dans tous les domaines :
– démographie : identification/localisation réelle de la population, recensement, données statistiques sur la mobilité urbaine, communale et locale et la surveillance des frontières
– politique éducative : nombre d’enfants d’âge scolaires, des étudiants etc. (besoins en offre et services éducatifs)
– politique de santé : besoins en infrastructures cliniques et hospitalières, besoins en personnel médical, indigence, troisième âge etc.
– fiscalité : projections et simulations de perception des impôts nationaux et locaux
– police : contrôle accru de l’immigration, de l’expatriation, amélioration de la recherche
et du renseignement ;
– urbanisme et habitat : mesures pour l’amélioration des cadres de vie, hygiène, salubrité
– foncier : données propriétaires/locataires, taxes, cadastre, etc.
– emploi : recoupements CNSS, politique de l’emploi, nomenclature des métiers etc.
– eau et électricité : localisation précise des besoins en adduction d’eau et en
raccordement au réseau électrique.
– divers (identification précise des ménages des militaires et des policiers, identification
des membres des associations sans buts lucratifs et des ONG et des sectes)
Le certificat de composition de ménage offre un tableau de bord national des politiques sectorielles à mener et permet aux administrations d’agir en pilotage automatique en ce qui concerne la fourniture de services publics.
Dans le contexte congolais le certificat de composition de ménage serait exigible pour :
– délivrance ultérieure de tout document administratif communal, provincial ou national (passeport, permis de conduire, registre de commerce et numéro d’identification nationale, délivrance de patente, numéro impôt, titre foncier, plaques minéralogiques, etc.)
– acte de la vie (mariage civil/coutumier, succession, décès etc.)
– inscriptions scolaires et académiques, formations etc.
– accès au logement
– accès au marché du travail (recoupement des données de la sécurité sociale)
– enregistrement du contrat de bail
– achat/vente immobilier
– établissement (commerce et profession libérale)
– immigration (police des étrangers etc.)
– changement d’adresse
– etc.
L’introduction du certificat de composition de ménage comme instrument de gestion des populations et des migrations permettrait une distinction réelle entre population effectivement résidente et les mouvements migratoires (limitation de l’exode rural.) avec pour conséquence administrative une recomposition fiable des registres de la population et la disposition de statistiques sectorielles exploitables.
Les communes seront fondées à refuser l’inscription dans leurs registres si les conditions de logement et d’hébergement ne sont pas remplies par les demandeurs, ce qui limitera drastiquement leur implantation non motivée dans la capitale.
En matérialisant la collecte en temps réel des données classiques de la gestion administrative, le certificat de composition de ménage facilite la planification à grande échelle des politiques sectorielles. Il permet aux administrations d’envisager de manière réaliste les politiques appropriées et de prendre des mesures adéquates et adaptées aux situations réelles.
La mise en œuvre du certificat de composition de ménage ne nécessite aucune expertise extérieure. Les problèmes logistiques qui pourraient survenir sont de loin inférieurs aux moyens qui ont été mobilisés par la généralisation de la carte d’électeur au niveau national et les données du fichier électoral permettront des comparaisons utiles avec les registres de la population à travers le certificat de composition de ménage.
Dans le contexte de la décentralisation de la République Démocratique du Congo, les instructions concernant la mise en œuvre du certificat de composition de ménage pourront être données par le Président de la République à la Conférence des Gouverneurs.
Un Comité d’études interministériel pourrait être constitué, comprenant des experts du Cabinet du Président de la République, de la Primature, des ministères de l’Intérieur, des Finances, du Budget, du Plan, des Affaires foncières, de la Fonction publique, de l’Urbanisme, du MNS, etc, et des provinces ainsi que des experts du secteur de la sécurité, CNS, PNC, ANR, DGM, FARDC.
Le Comité d’étude examinera notamment les questions relatives à :
– la conception matérielle de la composition de ménage
– les modalités de sa délivrance
– les modalités de contrôle et de suivi
– le cadre légal et réglementaire
– les moyens initiaux et permanents nécessaires
– les prévisions financières de mise en œuvre
– les projections de recettes générées par sa délivrance
– la dévolution de la gestion informatique des données, à savoir les organismes qui
seront habilités à disposer de manière permanente ou temporaire des données contenues dans le fichier national conservant les données reprises dans les certificats de composition de ménage.
L’utilisation généralisée du certificat de composition de ménage constituerait une source de recettes non négligeables pour le gouvernement central, les provinces et les entités décentralisées.
Une estimation approximative révèle le potentiel fiscal suivant :
Pour un coût unitaire du certificat de composition de ménage de 3600 FC, avec une durée de validité de 3 mois maximum et une population estimée à 90 millions d’habitants, le certificat étant susceptible d’être demandé 2 à 3 fois l’an, voire plus, les recettes théoriques pourraient s’élever à 3600 FC x 90.000.000 hab x 2 demandes annuelles soit 972 milliards de francs congolais.
Par le volume des recettes qu’il génère, le certificat de composition de ménage autofinance sa mise en œuvre et finance également une amélioration immédiate du fonctionnement des administrations communales et des entités de base. Il contribue ainsi directement à la réussite de la décentralisation.
Cas concret :
M. KALONDA est domicilié avenue Patu n° 10 dans la commune de Selambao. Il est commerçant, propriétaire de son logement et vient d’acheter une voiture. Il est marié et père de 4 enfants. L’aîné est à l’université, le deuxième va entrer au secondaire, le troisième est dans le primaire, et le dernier est un nourrisson. M. KALONDA héberge sa mère, âgée de 78 ans et son épouse est au chômage.
Pour obtenir sa plaque d’immatriculation, M. KALONDA doit présenter un certificat de composition de ménage timbré et délivré par l’administration communale de son lieu de résidence moyennement payement d’un montant de 3600 FC.
– le service d’immatriculation transmet par voie informatique la demande d’immatriculation aux niveaux provincial et central qui répercutent l’information à toutes les administrations.
– sur présentation du certificat de composition de ménage, la compagnie d’assurance sait avec certitude que M. KALONDA est effectivement domicilié à l’adresse mentionnée sur la police d’assurance et peut lui adresser ses ordres de payement
– la DGI sait également que M. KALONDA vient de faire l’achat d’un véhicule. Elle peut effectuer les contrôles appropriés concernant les revenus figurant sur sa feuille d’impôt.
– les entités centralisées et décentralisées peuvent prévoir une recette annualisée sur la taxe de roulage à payer par M. KALONDA pour sa voiture
– les services de santé publique peuvent prévoir la prise en charge sanitaire éventuelle de la mère de M. KALONDA, âgée de 78 ans, dans les structures d’accueil communales pour le troisième âge.
– les administrations des Affaires foncières, de l’Urbanisme et de l’Habitat peuvent calculer anticipativement l’impôt foncier à recouvrer et les revenus locatifs prévisibles, et veiller à l’application des mesures d’hygiènes appropriées au nombre des habitants du domicile de M. KALONDA.
– les administrations de l’enseignement supérieur et de la Recherche scientifique peuvent prévoir le coût d’une bourse d’étudiant pour le premier enfant de M. KALONDA.
– l’administration de l’Enseignement primaire et secondaire peut budgétiser le coût de l’achat d’un banc pour le primaire et d’un banc pour le secondaire pour les deux autres enfants de M. KALONDA, et vérifier si l’offre d’enseignement est localement disponible.
– l’administration de la Santé peut prévoir le processus de vaccination du nourrisson de la famille.
– l’administration du Travail et de la Prévoyance sociale connaît la disponibilité de l’épouse au chômage sur le marché de l’emploi et dispose de données fiables sur la qualité de commerçant de M. KALONDA, ce qui lui permet de calculer ses cotisations
sociales et le montant de sa retraite.
– pour renouveler sa patente de commerçant ou actualiser son registre de commerce,
M. KALONDA doit présenter un certificat de composition de ménage en cours de validité (3 mois) aux administrations concernées. A défaut il demandera la délivrance d’un nouveau certificat au cout de 3600 FC.
– un certificat de composition de ménage devra être délivré pour chacun des 4 enfants de M. KALONDA, soit pour l’inscription à l’université ou aux écoles secondaires et primaires, soit pour accéder au processus de vaccination
– les services de l’environnement peuvent évaluer avec précision la quantité de déchets produite par le ménage de M. KALONDA au n010 avenue Patu et prendre les mesures appropriées pour leur évacuation et la collecte des taxes afférentes.
– si M. KALONDA et sa famille déménagent, le ménage doit se présenter à la maison communale du nouveau lieu de résidence. Un nouveau certificat doit être sollicité puisque ce changement d’adresse devra figurer sur chacune de leurs nouvelles cartes d’identité ou d’électeur. Ce mouvement de population est transmis aux pouvoirs publics qui réagissent en conséquence.
– M. KALONDA et les membres de sa famille ne peuvent obtenir passeport, carte d’identité, carte d’électeur, carte de séjour ou permis de conduire sans présenter individuellement un certificat de composition de ménage en cours de validité.
Ce cas concret montre que le certificat de composition de ménage est un instrument fondamental et indispensable.
Il a permis à l’administration belge d’être l’une des plus performantes au monde.

Léon Engulu III
Philosophe,
Agrégé,
Ingénieur agronome.
Ancien Coordonnateur a.i. du Mécanisme National de Suivi Enseignant universitaire