L’épidémie s’aggrave, le Dr Mbungani appelle à une mobilisation nationale et africaine

 L’épidémie s’aggrave, le Dr Mbungani appelle à une mobilisation nationale et africaine

Depuis le début de l’année 2025, la République Démocratique du Congo est confrontée à une épidémie de choléra d’une ampleur inédite. Plus de 60 000 cas suspects ont été recensés, accompagnés de 1 800 décès, soit un taux de létalité de 3 %, bien supérieur aux seuils tolérables pour une maladie pourtant évitable. Le choléra, qui touche désormais 20 des 26 provinces du pays, progresse à un rythme alarmant, avec plus de 1 000 nouveaux cas et une trentaine de morts chaque semaine. Kinshasa, longtemps épargnée, enregistre désormais des cas dans plusieurs communes, confirmant l’installation de la maladie dans le tissu urbain.

Face à cette situation, l’honorable Dr Jean-Jacques Mbungani, ancien ministre de la Santé, a lancé un appel pressant à la communauté nationale et internationale. Il dénonce une gestion défaillante de l’épidémie, marquée par une déclaration tardive des premiers cas, notamment au Maniema et à la Tshopo, et par une réponse institutionnelle désorganisée. Les données épidémiologiques sont incomplètes, les bulletins de suivi ne sont pas régulièrement publiés, et les interventions sur le terrain semblent improvisées. Dans plusieurs provinces, la population reste peu informée des risques liés au choléra, ce qui favorise sa propagation silencieuse.

« La surveillance, la réponse et la coordination à l’épidémie de choléra ne sont pas optimales », affirme le Dr Mbungani, soulignant que plus des deux tiers des décès auraient pu être évités si la prise en charge avait été mieux organisée. Il s’inquiète également de l’absence d’un plan national de confinement, laissant le choléra se diffuser librement d’une province à l’autre, jusqu’à franchir les frontières vers l’Angola et le Congo-Brazzaville. Cette dynamique rappelle les heures sombres de 1994, lorsque l’Est du pays avait été ravagé par une crise sanitaire majeure.

Le choléra, maladie diarrhéique aiguë causée par la bactérie Vibrio cholerae, se transmet principalement par l’eau et les aliments contaminés. Il peut entraîner une déshydratation sévère et la mort en quelques heures si les soins ne sont pas administrés à temps. Pourtant, les solutions existent : accès à l’eau potable, hygiène de base, traitement oral de réhydratation, et campagnes de vaccination ciblées. Mais en RDC, ces mesures peinent à être déployées de manière cohérente et soutenue.

Dans son plaidoyer, le Dr Mbungani propose une série de mesures urgentes. Il appelle à la création d’un comité technique indépendant pour gérer les épidémies, estimant que les équipes actuelles sont dépassées. Il recommande d’intégrer les experts congolais qui avaient contribué à l’élimination rapide du choléra en Haïti en 2019, mais qui ne sont aujourd’hui associés à aucune stratégie nationale. « Aucun de ces experts n’est associé à la réponse de cette épidémie », déplore-t-il, regrettant que les compétences nationales soient ignorées au profit de mécanismes inefficaces.

À l’échelle continentale, la RDC pourrait s’inspirer de l’expérience du Mozambique, qui avait contenu une épidémie similaire en 2023 grâce à une coordination multisectorielle, ou du Cameroun, où une riposte communautaire rapide avait permis de maîtriser une flambée dans l’Extrême-Nord en moins de trois mois. Ces exemples montrent qu’une réponse bien structurée, fondée sur la transparence, la mobilisation communautaire et l’expertise locale, peut faire la différence.

L’appel du Dr Mbungani dépasse le cadre sanitaire. Il interpelle sur la capacité de l’État congolais à protéger ses citoyens, sur la nécessité de valoriser les compétences nationales, et sur l’urgence d’une solidarité africaine face aux menaces sanitaires transfrontalières. Il ne s’agit plus seulement de contenir une épidémie, mais de restaurer la confiance dans le système de santé, de réconcilier expertise et volonté politique, et de sauver des vies.

DMK

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