Au moins dix personnes ont été tuées mercredi à Goma dans le cadre d’une manifestation à l’appel d’une secte contre l’ONU en République démocratique du Congo, réprimée par l’armée avant qu’elle débute, dans cette région en proie à des violences.
Les membres d’une secte transmise à Goma mêlant rites chrétiens et animistes et dont le dernier nom qu’ils se sont donnés est “Foi naturelle judaïque et messianique vers les nations” avaient appelé fin août à manifester mercredi contre la Monusco, la mission de l’ONU en RDC, et à s’introduire dans leurs bases pour les forcer au départ.
Rencontrés dans leur temple par l’AFP mardi, les cadres de la secte avaient indiqué avoir identifié les domiciles du personnel de la Monusco et avaient déclaré être prêts à piller leurs habitations.
Avant que la manifestation – interdite quelques jours plus tôt par la mairie de Goma – ne débute, vers 04h00 (02h00 GMT), “les FARDC (armée congolaise) nous ont attaqués au local de notre radio et à notre temple et ils ont tué six personnes”, a dit à l’AFP Moleka Maregane, “chargée de sécurité” de la secte. Il a ajouté qu’au cours de cet assaut lancé par l’armée, leur chef “Mutumishi” (signifiant pasteur en swahili) Efraimu Bisimwa a été arrêté.
COMMUNIQUE - Manifestation violente dans la ville de Goma - 31 août 2023q
Peu après 12h00 (10h00 GMT), le gouvernorat du Nord-Kivu a déclaré dans un communiqué qu’un “groupe de bandits armés, drogués et manipulés (…) ont prémédité et semé le chaos dans notre ville”, revendiquant le départ de la Monusco, de la force régionale de la Communauté des États d’Afrique de l’est “ainsi que de tous les occidentaux y comprennent leurs ONG”.
Le lieutenant-colonel Guillaume Ndjike, porte-parole du gouverneur militaire, a indiqué que “dans les rangs des adeptes”, 158 personnes avaient été arrêtées. Dans les vidéos et les photos de l’arrestation, des mineurs, torses nus, sont visibles au milieu de femmes et d’hommes, assis par terre et gardés par des militaires.
– Inefficacité face aux groupes armés –
Interrogé par l’AFP plus tôt dans la matinée, le maire par intérim de Goma, le colonel Faustin Napenda Kapend, a confirmé qu’un policier a été lynché par les membres de la secte. Présent sur place, il a également confirmé l’incendie de leur temple par les forces de sécurité.
Par ailleurs, des sources hospitalières ont indiqué avoir admis dans la matinée 33 personnes blessées dans ces violences, dont trois sont décédées.
Ces événements violents s’inscrivent dans une série d’attaques et de manifestations contre la mission de l’ONU en RDC, accusée d’inefficacité dans la lutte contre les groupes armés.
En juillet 2022, dans plusieurs villes des provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, des manifestants avaient pris d’assaut les installations de la Monusco. Selon les autorités, 36 personnes, dont quatre Casques bleus, avaient été tuées.
En juin dernier au cours d’une visite à Kinshasa, le secrétaire général adjoint des Nations Unies pour les opérations de paix Jean-Pierre Lacroix, a expliqué que l’ONU étudie comment retirer sa force de maintien de la paix en RDC “le plus rapidement possible” mais de manière “graduelle et responsable”.
Et d’ajouter qu’“il y a une frustration d’une partie de la population (…), parce que la situation sécuritaire est encore préoccupante” mais qu’“il y a aussi des manipulations, des fake news (.. .), parce que tout le monde n’a pas intérêt au retour de la paix”.
Les manifestations se multiplient depuis deux ans contre la Monusco, à qui les habitants reprochent de ne pas parvenir à neutraliser les dizaines de groupes armés qui sévissent dans l’est de la RDC depuis près de 30 ans, notamment les rebelles du M23.
La province du Nord-Kivu, frontalière du Rwanda et de l’Ouganda, est au cœur des violences armées en cours depuis près de 30 ans dans l’est congolais, avec des rébellions répétées et des drames humanitaires constants.
Par AFP avec Ouragan