CABINET LECC: Note de cadrage à l’attention du Professeur Gode Mpoy

Honorable Député,
Au cours de l’émission Dossier du soir, diffusée sur Télé 50, vous avez affirmé, critiquant l’action du Gouvernement sur l’appréciation du franc congolais face au dollar, que « les lois économiques sont les plus têtues du monde ». Cette formule, bien que courante, appelle un rectificatif de nature épistémologique, l’économie appartenant aux sciences sociales et non aux sciences exactes.
1. Parler de “lois” dans les sciences sociales est un abus de langage
Lorsqu’on parle de « lois économiques » ou de « lois sociologiques », on emploie le mot loi par analogie avec les lois de la physique. Mais en réalité, les sciences sociales n’ont pas de lois au sens strict, c’est-à-dire des relations universelles, nécessaires et invariantes. En physique, une loi exprime une relation constante. En économie, une “loi” comme celle de l’offre et de la demande décrit une tendance générale, valable seulement dans certaines conditions (marché libre, information complète, rationalité des agents, etc.).
Autrement dit, les « lois » sociales sont conditionnelles, historiques et contextuelles, non universelles.
2. Pourquoi cette différence ?
Les phénomènes économiques et sociaux impliquent des êtres conscients, capables d’apprendre, de changer et d’influencer le système qui les observe. Cette réflexivité rend impossible toute loi rigide : une fois connue, une “loi” sociale peut être déjouée par les acteurs eux-mêmes.
Ainsi, les régularités économiques ne sont pas des nécessités physiques, mais des tendances structurelles modifiables par la politique, l’innovation ou la culture.
3. Sur la formule « les lois les plus têtues du monde »
Cette expression, souvent reprise par les économistes classiques, n’a pas de valeur scientifique mais rhétorique.
Elle souligne que certaines contraintes économiques, comme la rareté, les équilibres budgétaires ou la valeur d’échange, résistent à la volonté politique quand elles ne sont pas accompagnées de réformes structurelles. Mais parler de “têtutesse” des lois économiques, c’est oublier que l’économie est avant tout une construction humaine, où les institutions, les politiques publiques et les comportements collectifs redéfinissent sans cesse les “règles du jeu”.
4. En résumé
Les sciences sociales ne formulent pas des lois naturelles, mais des récits réguliers de comportement collectif. Elles décrivent ce qui tend à se produire dans certains contextes, plutôt que ce qui doit nécessairement se produire. C’est cette plasticité qui fait leur force et leur responsabilité : la politique économique peut infléchir les trajectoires collectives si elle agit sur les bons leviers.
5. En conclusion
Il convient de saluer ici l’action du Gouverneur André Wameso, dont la politique de rigueur et de coordination monétaire a permis une appréciation notable et inédite du franc congolais et une stabilisation des prix, tant dans la téléphonie mobile que dans les biens de première nécessité.
Cette évolution témoigne du fait que, loin d’être “têtues”, les régularités économiques peuvent être inversées par une gouvernance lucide et cohérente.
Léon ENGULU III
Directeur Associé – Cabinet LECC
