La rentrée parlementaire risque d’être sous haute tension...: Vital Kamerhe sur une pente glissante !

La rentrée du 15 septembre 2025 s’annonce explosive à l’Assemblée nationale et on sent déjà les prémices d’une session parlementaire sous haute tension. En effet, à la fin de la semaine écoulée, pas moins de 131 députés ont signé une motion de défiance contre Vital Kamerhe, président de la chambre basse. Un moisson dépassant largement le seuil requis pour envisager sa destitution. Les griefs reprochés au speaker sont lourds, parce qu’il est fait mention à son encontre, d’une gestion opaque des fonds parlementaires, du paiement irrégulier et fragmenté des émoluments, de la suppression des soins médicaux pour les députés et leurs familles, de l’absence de dotation en véhicules de fonction et même des accusations de tentatives d’achat de signatures, à hauteur de 500 USD par député…
Pour beaucoup d’acteurs politiques approchés par notre rédaction, ce n’est pas qu’une affaire de gestion dès lors que cette fronde révèle des fractures profondes au sein de l’Union sacrée, et pourrait redéfinir les équilibres politiques à l’approche d’échéances majeures. Kamerhe, pourtant élu avec une large majorité en mai 2024, se retrouve aujourd’hui sur une chaise éjectable. Quand bien même, certains observateurs mettent en garde contre les conséquences nationales de son éviction, estimant que Kamerhe est perçu comme un pont entre l’Est et l’Ouest, et son départ pourrait raviver les tensions communautaires.
Un test grandeur nature
Ce moment est un test grandeur nature pour la résilience institutionnelle de la RDC, nous a confié un membre influent de la Société Civile convaincu que si la motion aboutit, elle pourrait ouvrir la voie à une recomposition politique majeure. Si elle échoue, elle risque de laisser des cicatrices durables dans la majorité. Dans tous les cas, cette rentrée parlementaire est bien plus qu’un simple retour aux débats, c’est un révélateur des tensions, des ambitions, et des limites du consensus au sein du pouvoir.
Kamerhe secoue le cocotier, et les noix tombent !
Ce qui arrive à Kamerhe n’est pas un fait du hasard, entend-t-on dans les cercles de l’Union sacrée de la nation où l’on fait croire qu’il a lui-même creusé sa propre tombe en prenant une certaine distance avec la plateforme présidentielle, allant jusqu’à la déclarer incapable de gérer un dialogue national inclusif à l’interne, préférant que ce soit un médiateur ou des médiateurs de l’extérieur pour cette tâche, cas du très controversé Thabo Mbeki. Une dynamique politique bien plus complexe que ce que laisse entendre la simple motion de défiance. Un analyste a laissé entendre que ce qui se joue autour de Vital Kamerhe ressemble moins à une querelle de gestion qu’à un réglement de comptes stratégique, nourri par des tensions accumulées au sein de l’Union sacrée.
En effet depuis plusieurs mois, Kamerhe semble avoir pris ses distances avec la ligne officielle de la majorité présidentielle. Dernièrement, il a publiquement exprimé son scepticisme quant à la capacité de l’Union sacrée à piloter un dialogue national inclusif, préférant l’intervention d’un médiateur externe -en l’occurrence Thabo Mbeki, ancien président sud-africain-, comme ci-dessus mentionné. Une position aux antipodes de celle adoptée par le chef de l’État Tshisekedi face à la question. Ce choix du président de l’Assemblée nationale, loin d’être anodin, a été perçu comme une défiance institutionnelle, voire une tentative de repositionnement diplomatique.
L’on se souvient que Vital Kamerhe a récemment salué les efforts diplomatiques menés à Doha et Washington, impliquant le gouvernement congolais, le Rwanda, et les rebelles du M23. Il a même plaidé pour une diplomatie parlementaire active, en collaboration avec des partenaires européens comme la Belgique. Ce positionnement renforce l’idée qu’il cherche à élargir le spectre diplomatique, au-delà des canaux classiques, ce qui peut être vu comme une tentative de repositionnement personnel ou comme une stratégie de contournement du pouvoir exécutif, selon d’aucuns.
En Afrique du Sud : entre soins médicaux et diplomatie parallèle
Officiellement, Kamerhe s’est rendu dernièrement en Afrique du Sud pour des raisons médicales. Mais selon plusieurs sources, il aurait été convié à la conférence de la Fondation Thabo Mbeki, qui réunissait des figures de l’opposition politique et militaire, dont Katumbi, Fayulu, Kabila, Nangaa et même des représentants de l’AFC-M23. Le gouvernement congolais, par la voix de Patrick Muyaya, a jugé cette initiative « inopportune » et a refusé d’y envoyer des représentants, accusant Mbeki de complaisance envers les agresseurs de la RDC.
Double jeu ou stratégie d’ouverture ?
La présence ou même la simple invitation de Kamerhe à ce forum a été interprétée comme une tentative de dialogue parallèle, hors des canaux officiels. Cela a provoqué une onde de choc au sein de l’Union sacrée, où certains y ont vu une trahison politique, d’autres une manœuvre d’émancipation. Kamerhe, en secouant le cocotier, semble vouloir tester les limites de sa marge de manœuvre, quitte à provoquer une chute brutale.
Le retour de la manivelle
Ce qui arrive à Kamerhe n’est pas un accident. C’est le résultat d’un enchaînement de gestes politiques, où la posture de médiateur, l’ouverture vers l’opposition, et la critique interne de l’Union sacrée ont fini par l’isoler. La motion de défiance n’est que la traduction institutionnelle d’un malaise politique plus profond.
Laurent BUADI
