L’accord de paix de Washington : un texte déjà fragilisé ?: Kigali entre déni et provocation !

 L’accord de paix de Washington : un texte déjà fragilisé ?: Kigali entre déni et provocation !

L’accord de paix dit du siècle signé le 27 juin 2025 par la RDC et le Rwanda, sous médiation américaine prévoit le respect de l’intégrité territoriale, la cessation des hostilités, le désengagement militaire, le désarmement des groupes armés, un cadre de coopération économique régionale, comme points essentiels qui le sous-tendent.

Mais à peine dix jours après sa signature, force est de constater que les les accusations croisées reprennent de plus belle, Kigali nie toute implication militaire dans l’insécurité à l’Est de la RDC, tandis que de son côté, Kinshasa dénonce une mauvaise foi manifeste.

L’ambiguïté et la tension croissante autour des récentes déclarations de Paul Kagame et de son ministre des Affaires étrangères ne sont que des faisceaux de lumière sur leur envie de ne pas se plier face aux impositions de l’accord qu’ils venaient de signer sûrement pas de bonne foi, mais par contrainte. Ça ne peut être que cela, dans la mesure où, Paul Kagame a récemment nié à plusieurs reprises la présence de troupes rwandaises en RDC, malgré la signature de l’accord de paix à Washington, le 27 juin 2025. Cette posture a été vivement critiquée par Kinshasa, notamment par Patrick Muyaya, porte-parole du gouvernement congolais, qui a qualifié ces propos de « mensonges qui touchent à leur fin ».

En effet, Paul Kagame affirme que le conflit est mal présenté comme un simple différend Rwanda-RDC, insistant sur le rôle des groupes armés internes comme le M23. Son habituel rengaine. Une pillule qui ne passe plus, car détruite par la diplomatie de Félix Tshisekedi et Thérèse Kayikwamba Wagner.

Kagame tente, en outre, de dissocier l’accord de Washington pourtant entre États, du processus de Doha qui, lui, est négocié entre la RDC et les groupes armés. Pour maints observateurs, cette façon de voir les choses est perçu comme une stratégie dilatoire.

À tel point que Augustin Kabuya, président a.i de l’UDPS, estime que les “sorties médiatiques incontrôlées” de Kagame révèlent son malaise face à un accord qui ne lui serait pas favorable.

Et les mêmes observateurs de se demander si le discours du ministre rwandais des Affaires étrangères Olivier Nduhungirehe est une posture défensive ou une rhétorique guerrière ? Ils s’inquiètent en entendant Nduhungirehe conditionnant le retrait des troupes Rwandaises par la neutralisation préalable des FDLR, allant plus loin jusqu’à déclarer que la RDC se préparait à envahir le Rwanda pour ainsi justifier une posture « défensive » de Kigali, en affirmant que le Rwanda fait face à une « menace existentielle » depuis 30 ans, causée par les FDLR soutenus, selon lui, par Kinshasa.

Le discours du ministre Olivier Nduhungirehe s’inscrit dans une logique bien connue : la fabrication d’une menace extérieure pour justifier une posture militariste.

Parce qu’il soutient que les mesures prises (déploiement d’armes sophistiquées, défense aérienne) visent à empêcher que la guerre en RDC n’arrive sur leur propre territoire.

Nduhungirehe conteste par ailleurs, la présence de troupes rwandaises en RDC, malgré les preuves documentées par l’ONU et les médias, signe que la guerre dont il parle est toujours là, soutenue par Kigali, malgré les sanctions des Nations unies leur imposées et les prescrits de l’accord de Washington qu’ils ont signé.

Le M23, soutenu par Kigali selon l’ONU, contrôle toujours des zones stratégiques dans l’Est de la RDC. Les combats continuent, les civils fuient, et les promesses de paix semblent déjà compromises.

Entre diplomatie piégée et stratégie de tension

A la lumière de ces déclarations de Paul Kagame et de son ministre des Affaires étrangères, ainsi que du contexte post-accord de Washington, des milieux diplomatiques craignent, non sans raison, que cet accord de paix soit vidé de sa substance, car à peine dix jours après sa signature, les signaux envoyés par Kigali remettent en question sa sincérité, en affichant une posture qui suggère une stratégie de temporisation, visant à gagner du temps tout en consolidant les positions militaires du M23 sur le terrain.

En accusant la RDC de préparer une guerre contre le Rwanda, Kigali ne cherche qu’à renverser la narration et à se présenter comme victime, une stratégie qui vise à mobiliser l’opinion publique rwandaise autour d’un sentiment d’encerclement, tout en désamorçant les critiques internationales, pensent des analystes, convaincus que le Rwanda instrumentalise la peur pour renforcer son contrôle interne et brouiller les responsabilités.

La RDC face à un dilemme stratégique

Pour les mêmes milieux diplomatiques, la situation du côté Kinshasa, est doublement complexe avec d’un côté, la pression populaire qui exige une réponse ferme face à l’agression rwandaise, et de l’autre côté, les partenaires internationaux (États-Unis, Union africaine) qui appellent à la retenue et à la poursuite du dialogue.

Le gouvernement congolais doit de ce point de vue, maintenir la légitimité morale de sa position en respectant l’accord de paix, renforcer ses capacités militaires pour éviter de se retrouver en position de faiblesse, et mobiliser la diplomatie régionale (notamment l’Angola, le Burundi, la SADC) pour isoler Kigali, conseillent ces milieux diplomatiques dans la mesure où, répètent-ils, Kinshasa marche sur une ligne de crête entre fermeté et diplomatie.

Un conflit aux résonances géopolitiques régionales

Ce conflit dépasse largement les frontières de la RDC et du Rwanda, à en croire plusieurs spécialistes de la géopolitique, parce qu’il met en lumière les failles de la gouvernance régionale et l’échec des mécanismes de sécurité collective. Il révèle également les rivalités d’influence entre puissances africaines (Angola, Afrique du Sud) et puissances extérieures (États-Unis, Chine, Russie), tout en menaçant la stabilité de toute la région des Grands Lacs, avec des risques de débordement vers l’Ouganda, le Burundi et la Tanzanie.

“Ce conflit est un test pour la diplomatie africaine et la crédibilité des accords de paix”, m’a confié un professeur des Sciences politiques.

Laurent BUADI 

 

 

 

 

 

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