La Mission Prophétique de l’Église en RDC : Entre Engagement Spirituel et Défis Politiques.

 La Mission Prophétique de l’Église en RDC : Entre Engagement Spirituel et Défis Politiques.

La République Démocratique du Congo (RDC) est souvent mise en avant comme un pays béni, en raison de l’abondance de ses ressources naturelles et de la diversité de ses cultures. Pourtant, cette image lumineuse est ternie par des dynamiques politiques complexes et des influences contestables de certains leaders religieux. Dans un pays où l’Église est censée incarner les valeurs de lumière et de vérité, des préoccupations émergent quant à la gestion réelle de cette mission prophétique.La question cruciale reste alors : pourquoi les églises chrétiennes semblent-elles plus impliquées dans des enjeux politiques que dans l’amélioration des conditions de vie de leurs fidèles ? Cet article vise à examiner les pratiques de ces institutions religieuses, leur engagement social et les dérives possibles de leur gestion.

 

Les Églises et leur Engagement Politique .

Les églises chrétiennes en RDC se sont progressivement transformées en acteurs politiques puissants, influant sur les choix des électeurs tout en prenant part activement à la vie politique. De nombreux leaders religieux ont échangé leur mission spirituelle contre une position de médiateurs dans des crises politiques. Toutefois, cet engagement soulève la question de savoir si ces leaders agissent réellement au service de leurs fidèles ou s’ils s’emploient uniquement à défendre leurs propres intérêts. En adoptant des postures politiques, ces responsables religieux passent parfois au second plan leur vocation évangélique, ce qui crée une confusion sur leur vraie mission.

 

Cette confusion peut entraîner un phénomène d’hyperpolitisation, où le message religieux perd de sa clarté. Les fidèles, en proie à des doutes, se retrouvent à naviguer entre la foi et les manœuvres politiques de ceux qui sont censés les guider spirituellement. Par ailleurs, l’alignement des églises sur des agendas politiques peut mener à un manque de critiques sur la corruption et sur les abus de pouvoir, ce qui est en totale contradiction avec les valeurs chrétiennes prônées.

 

Le besoin d’une rupture entre la politique et l’Église se fait donc pressant. Les leaders religieux sont attendus pour se concentrer sur leur mission d’apporter espoir et réconfort aux plus démunis, en se positionnant comme des défenseurs de la justice sociale. En s’investissant dans les luttes politiques, l’Église court le risque de se perdre et de compromettre sa légitimité, ce qui n’est pas sans conséquence pour les fidèles en quête de guidance spirituelle.

 

Une Opacité à Reprocher .

 

Malgré une rhétorique axée sur l’amélioration des conditions de vie des Congolais, les résultats concrets des actions menées par les églises restent en dessous des attentes. De nombreux sermons évoquent les valeurs de partage, de solidarité et de justice sociale, mais les initiatives effectives sont souvent rares et limitées. Lorsque ces institutions sont critiquées, les leaders religieux évoquent les défis économiques et politiques pour justifier leur inaction. Néanmoins, cela ne peut suffire à masquer le contraste entre leurs discours et les réalités vécues par leurs fidèles.

 

Ce décalage est particulièrement présent dans le secteur éducatif, où les écoles gérées par des églises affichent des frais de scolarité exorbitants, rendant l’éducation inaccessible à de nombreuses familles. Alors que l’éducation devrait être un outil d’émancipation et de transformation sociale, cette réponse économique aux enjeux éducatifs renvoie une image de déconnexion entre les pensées spirituelles et les réalités quotidiennes des Congolais. En pratiquant cette exclusion par l’argent, les églises mettent en péril leur mission de guider et d’élever les âmes.

 

Les églises doivent en outre faire face à des allégations de mauvaise gestion et d’opacité dans leurs finances. Les membres de la communauté se demande où vont les fonds collectés à travers les dîmes et les offrandes. Les rapports de détournement et d’utilisation abusive des ressources affluent, ternissant l’image des églises et soulevant des questions légitimes sur la transparence et l’éthique. Les fidèles, de plus en plus désabusés, s’interrogent sur la sincérité de leurs leaders spirituels.

 

Rémunération et Conditions de Travail.

 

Un autre aspect préoccupant concerne les conditions de travail au sein des institutions religieuses, qui semblent souvent ignorer les principes de justice économique. De nombreux agents, qu’ils soient enseignants, pasteurs ou membres du personnel administratif, reçoivent des salaires qui ne reflètent ni leur engagement ni l’importance de leurs missions. Dans une société où les inégalités économiques sont déjà criantes, cette situation contribue à renforcer le sentiment d’injustice parmi ceux qui travaillent pour l’Église.

 

Ces employés, souvent sous-payés et surchargés de travail, doivent jongler avec des exigences de performance élevées, tout en faisant face à des conditions de travail dégradantes. Cela posent un dilemme éthique majeur pour les églises : comment plaider pour la dignité humaine en dehors de l’Église lorsque ceux qui y travaillent souffrent de l’indifférence à leur condition ? En cultivant des pratiques managériales douteuses, les églises se mettent au même niveau que les politiques qu’elles critiquent.

 

Les témoignages de détournement et de mauvaise gestion continuent de résonner dans les communautés. Cette perception trouble la distinction entre éthique religieuse et intérêts personnels, ce qui donne aux fidèles de raison de douter de la légitimité de leurs leaders et de leurs institutions. Pour regagner la confiance et le respect, les églises doivent apprendre à s’auto-réguler, en plaçant l’intégrité au cœur de leurs opérations.

 

Conclusion

Les églises chrétiennes en RDC, par leur engagement dans la vie politique et par leurs pratiques de gestion, risquent de diluer leur mission prophétique et de perdre de vue leur raison d’être. Les enjeux politiques et économiques doivent être séparés de leur mandat spirituel pour que les institutions religieuses puissent revendiquer un véritable rôle de catalyseur de changement dans la société congolaise. En mettant l’accent sur des préoccupations matérielles plutôt que spirituelles, elles sapent leur autorité morale, et ce, malgré leurs discours prometteurs. Ainsi, pour redonner un sens à leur mission, il est impératif que ces églises s’engagent à promouvoir des valeurs d’amour, de justice et de service, en se consacrant pleinement à l’amélioration des conditions de vie des Congolais qu’elles prétendent servir. Cela passe par une réévaluation de leur priorisation des engagements qui devraient se refléter dans des actes tangibles de changement social et d’aide à ceux qui en ont besoin, loin des souffrances politiques.

 

Par:Jean Aimé Mbiya Bondo Shabanza  

 

Analyste Socio-Politique

Expert en Administration Publique

Vice-Président Fédéral et Représentant Adjoint de l’UDPS Tshisekedi aux USA

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