Kinshasa : Capitale ou Labyrinthe ? Quand l’État, les entreprises et la population sabotent l’urbanisme

 Kinshasa : Capitale ou Labyrinthe ? Quand l’État, les entreprises et la population sabotent l’urbanisme

Le visage de Kinshasa change, mais pas toujours pour le mieux. Dans une ville qui devrait incarner l’ordre, le progrès et la modernité, règne un désordre urbanistique qui frôle la catastrophe. Si l’on pointe souvent du doigt la population pour les constructions anarchiques, il est temps de se demander : que fait réellement l’État, et que dire des sociétés publiques et privées qui participent allègrement à cette pagaille ?

L’anarchie populaire… tolérée par l’État ?

Les quartiers spontanés poussent comme des champignons, souvent sans plans, sans respect des normes de construction, et dans des zones à haut risque d’érosion ou d’inondation. Les habitants, par manque d’options viables ou par simple défi aux règles, bâtissent où bon leur semble. Pourtant, ces actes illégaux semblent parfois encouragés par un paradoxe : des permis de bâtir délivrés par le ministère de l’Urbanisme lui-même. Incompétence ? Corruption ? Complicité tacite ? Difficile à dire, mais le résultat est là : des maisons construites dans les lits de rivières ou au bord de ravins, que l’État finit par démolir… au nom de la loi qu’il a lui-même enfreinte.

 

Les entreprises d’État, reines du désordre

Mais l’anarchie ne s’arrête pas aux habitations. Des entreprises publiques comme la Société Nationale d’Électricité (SNEL) et la REGIDESO semblent avoir érigé l’improvisation en mode opératoire. Poteaux électriques bancals, câbles dénudés flottant au-dessus des routes, tranchées ouvertes au milieu de chaussées asphaltées puis abandonnées sans réparation… Leur contribution au chaos urbanistique est tout sauf négligeable. Et que dire des mesures de sécurité ? Inexistantes. Chaque poteau mal planté ou canalisation exposée est un accident en attente.

 

Le secteur privé n’est pas en reste

Les sociétés de télécommunications ne font pas mieux. Antennes installées sans études d’impact, fibres optiques déroulées au mépris de l’esthétique urbaine et des normes techniques, poteaux dressés n’importe où, souvent en doublon ou triplon sur un même axe… Un véritable gâchis visuel et fonctionnel qui ne fait qu’aggraver le désordre.

 

Urbanisme : un mot vidé de son sens ?

Aujourd’hui, l’urbanisme à Kinshasa semble se résumer à des démolitions spectaculaires de maisons de pauvres filmées pour la télé. Pendant ce temps, les véritables responsables – institutions de l’État, entreprises publiques et multinationales – continuent à opérer en toute impunité, détruisant progressivement ce qu’il reste de cohérence dans la ville. Il est urgent que les mesures urbanistiques s’élargissent à toutes les infrastructures, sans exception : réseaux d’eau, d’électricité, de télécoms, routes, etc.

 

Kinshasa mérite mieux. Elle mérite une vision, une coordination rigoureuse, et un respect strict des normes. Tant que l’on continuera à tolérer ce désordre généralisé, la capitale congolaise restera non pas un symbole de modernité, mais un labyrinthe de contradictions.

 

Christian Tandu

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