Une Belge d’origine congolaise, Mme Julienne MPEMBA, a été condamnée, le 10 octobre 2024, à dix ans de prison ferme avec arrestation immédiate, par le Tribunal correctionnel de Namur, en Belgique, ont rapporté les médias, pour des cas d’adoptions des enfants venus de la République démocratique du Congo (RDC) en 2015.
Nous ne sommes pas impliqués, ni de près ni de loin, dans ces adoptions et nous n’avons touché aucun Franc de la victime ; mais l’honnêteté intellectuelle nous oblige d’éclairer l’opinion à ce sujet en portant un regard critique sur le jugement rendu par ce tribunal eu égard à notre modeste expertise en matière de protection et d’adoption internationale des enfants.
En effet, il est inacceptable que la Belgique – un pays respectable en matière de protection et d’adoption internationale des enfants – puisse offrir au monde le spectacle d’un procès injuste, mettant en cause Mme Julienne MPEMBA, une femme qui se bat non seulement pour sa famille monoparentale ; mais aussi et surtout pour sa famille élargie, constituée d’enfants abandonnés. En RDC, la situation sociale est préoccupante pour environ 90% d’enfants vivant en familles ; et le sort des enfants marginalisés est dramatique.
Même s’il y avait eu quelques failles dans la procédure d’adoption de certains enfants venus de la RDC, nous attirons l’attention des autorités fédérales belges et des personnes éprises de justice ; car le procès Julienne MPEMBA s’apparente à un montage, orchestré par certains individus pour salir l’image de notoriété et l’image de marque du Royaume de Belgique en matière d’adoption internationale des enfants. La Belgique, faut-il le rappeler, pratique l’adoption internationale 30 ans avant l’avènement de la Convention de La Haye, le 23 mai 1993.
A la lumière de dispositions de cet instrument juridique international et de la législation belge ainsi que de la réglementation congolaise en la matière, Mme Julienne MPEMBA n’a aucun pouvoir administratif, ne délivre aucun document (vrai ou faux), et n’avalise aucune étape de la procédure d’adoption internationale des enfants. La structure d’hébergement ou l’orphelinat propose des enfants à l’adoption (au nom du droit de chaque enfant à une famille) et ne dispose d’aucun pouvoir administratif.
Reconnaissance des adoptions en Belgique
Aucun enfant ne peut se déplacer du pays d’origine vers la Belgique sans l’aval de l’Autorité centrale, la Direction de l’Adoption. Vers 2015, cette direction était coordonnée par Monsieur Didier DEHOU. Nous étions informés de ses missions à Kinshasa. En plus, aucun enfant ne peut se rendre en Belgique sans visa. Ce n’est pas Mme Julienne MPEMBA qui délivre les visas Schengen. C’est plutôt l’Ambassade de Belgique à Kinshasa, qui dispose, en principe, de toute la logistique et de tous les moyens nécessaires pour vérifier l’authenticité des dossiers des enfants proposés à l’adoption avant la délivrance des visas.
L’injustice saute aux yeux et réside dans le fait que Mme Julienne MPEMBA soit la seule inculpée alors que le processus d’adoption des enfants à l’étranger est complexe et implique différents acteurs ayant la responsabilité de vérification de l’origine des enfants et de la régularité de la procédure. Si le Tribunal correctionnel de Namur ne roulait pas à double vitesse, le Responsable de la Direction de l’Adoption, les représentants des Organismes belges agréés d’adoption (OAA), l’Ambassadeur de la Belgique à Kinshasa, de l’époque, devraient aussi répondre de griefs reprochés à Mme Julienne MPEMBA. D’où, la question, logique : Pourquoi régler les comptes à une Belge d’origine africaine et « blanchir » les Blancs ?
L’avocat de trois familles, Me Vincent LURQUIN, rejoint notre analyse et se pose autrement la question ci-dessus lorsqu’il envisage d’introduire une procédure au civil (ça devrait commencer au pénal) afin que des décisions soient rendues sur « la responsabilité de toute la chaîne belge d’adoption et du politique. »
Frais des adoptions
Il est aberrant et honteux que le Tribunal correctionnel de Namur puisse condamner Mme Julienne MPEMBA pour « monnayage à plus haut prix » des enfants. Les frais payés par les familles adoptantes sont réglementaires et ne constituent nullement le prix d’achat de l’enfant pour le couple adoptif ; et moins encore le prix de vente de l’enfant pour l’orphelinat. Ces frais sont une contribution de la famille adoptante à la prise en charge de l’enfant adopté et des enfants restés dans l’orphelinat. Et d’ailleurs, la grosse part de ces frais revient aux OAA belges. Les orphelinats, dans la pratique, reçoivent des miettes. A titre illustratif, un OAA belge perçoit 2600 euros par enfant adopté au Burkina Faso comme frais de participation au fonctionnement ; 1250 euros pour un enfant adopté en Chine… Ajoutons à cela, les découvertes, les frais de voyage et de séjour dans les pays d’origine des enfants. Nous vous épargnons de statistiques des adoptions internationales de la Belgique, en notre possession, qui sont colossales.
Au regard de notre analyse, non complaisante, et pour préserver l’image de marque du Royaume de Belgique, nous recommandons aux autorités belges de libérer, sans condition, Mme Julienne MPEMBA, juriste et activiste de la défense et de la promotion des droits de l’enfant.
Fait à Kinshasa, le 15 octobre 2024
Job NKUNA
Expert et Consultant indépendant en Communication, Travail social, Protection de l’enfant et Adoption internationale