Yambi-Yambi PAPA FRANCISCE, CHRISTI PACIS AMATOR, SEMINATORQUE !

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Congo-Kinshasa, notre maison de la terre sous les ondes de choc des vagues à répétitions d’une chicaya politique récurrente à nulle autre pareille dans le monde habité, vit peut-être le dernier acte de la tragédie de son effondrement par délitescence et pourrissement.

La coupe déborde en années 2020 qui auront accumulé comme un concentré des tragédies que le pays vit depuis le 30 juin 1960, date de son accession à la souveraineté nationale et internationale !

Yambi Papa Francisce ! Yambi à Kinshasa ! Visite ses places populeuses, bariolées à la manière typiquement congolaise, celle au look de ses ‘‘hameaux urbains’’, ornées de tresses de palmes et de guirlandes de lys, et au milieu des chants d’allégresse étrangement mêlés aux flots des pleurs incessants des fils et filles du pays et des gémissements d’affliction de notre mère Rachel !

Yambi Papa Francisce ! Et vivement un détour par nos banlieues tentaculaires avec leurs chaînes de cités refuges du répugnant précariat urbain, ce monde de misère, qui grouille et prolifère à une cadence microbienne, sans travail, sans hygiène, sans nourriture : le lumpenprolétariat !

Jette un œil et vois, déjà à un jet de pierre de la grand-place aménagée en basilique mobile pour la Sainte messe, combien précaires sont les conditions de vie des dizaines de milliers de familles des squatteurs des cités spontanées qui poussent comme des champignons sur des sites érosifs ou inondables établis en zones pourtant classifiées « non aedificandi » !

Vois combien ces familles humaines vivent entassées sous l’étreinte d’une angoisse permanente, étouffant de peur-panique au moindre signe météo annonciateur d’orages et déluges, ces pluies diluviennes devenues particulièrement dévastatrices et meurtrières, à l’intensité et à la fréquence quasi-quotidienne exceptionnellement élevées !

Vois combien les bonnes consciences peuvent meurir de honte, de cette honte ambivalente, à la simple description éhontée par les résidents eux-mêmes de leurs mœurs dissolues, modes de vie, pratiques et activités débridées dans ces cités malfamées de la lignée de Sodome et Gomorrhe et dont la seule évocation des noms : cité kitoko, paka-djuma, grand-monde, bribano, point-chaud et tutti quanti, donne la chair de poule aux locuteurs des langues et idiomes locaux.

Vois tout cela ! Et jette aussi un œil vers le sycomore et vois Zachée ! Tends l’oreille vers et par-dessus nos avenues défoncées et les devantures de nos habitats en matériaux de fortune ou de réemploi et entends la voix de Bartimée !

0. Moi, guetteur de la nation, je suis ébloui par un songe horrible, celui de Congo-
Kinshasa définitivement déclinant, fracturé et craquelé longitudinalement et transversalement, en train de sombrer en pans et par fragments dans les entrailles profondes de l’immense bassin du grand fleuve Congo agité par les effluves d’un tsunami social dévastateur égalisateur des destins !
Des signes manifestes d’effondrement et d’engloutissement s’épaississent de plus en plus : une apocalypse imminente du corps social et même de l’ensemble du pays dans tous ses compartiments et articulations !

Je lève les yeux vers les montagnes : mon secours, d’où viendra-t-il ?Le secours vient de Yahvé qui a fait le ciel et la terre (Ps 121, 1-2)

1. Comment la maison Congo-Kinshasa peut-elle communier dans la jubilation de la
visite papale tout en portant perpétuellement le deuil de ses enfants massacrés par millions sur sa terre mise en coupe réglée par une myriade des forces du mal ? Deuil ou fête ?

Les célébrations tireront irrésistiblement sur la procession des Rameaux chantée par des chœurs des enfants des hébreux criant leur espérance de libération « Hosanna au Fils de David », « Pueri Hebraerum , portantes ramos olivarum » et « vestimenta prosternabant in via », et la lecture de la Passion, ponctuée du silence du Vendredi Saint, au temps de la vénération de la croix, temps d’affliction « Ecce lignum Crucis, in quo salus mundi pependit » et de contrition devant la désolation de notre Seigneur : « Popule meus, quid feci tibi ? Aut in quo contristavi te ? Réponde mihi » !
Le Congolais lambda savoure la proximité et la sollicitude toute paternelle que secrète la visite papale comme du baume à son cœur désespéré. En est-il de la discrète consigne du Vatican (révélée par la Nonciature Apostolique), toute de délicate sensibilité, visant à minimiser les restrictions de circulation imposées à la population dans la zone de la commune de la Gombe déclarée « juridiction papale » par l’autorité urbaine, ingrédient plutôt rare dans le traitement des gens de peu au Congo-Kinshasa !

2. Nullement acrimonieux ni surtout rabat-joie, le guetteur de la nation relève que quand
l’incurie de la maison Congo-Kinshasa en deuil ouvre la voie à des dépenses somptuaires au titre du programme gouvernemental de préparation de l’accueil du Saint-Père, cela détone négativement et gravement sur la renommée du Vatican dont la circonspection est la règle mère en matière de l’utilisation des ressources pour le bien commun.

Mieux vaut aller à la maison du deuil qu’à la maison du banquet ; puisque c’est la fin de tout homme, le vivant doit y prêter attention. Mieux vaut le chagrin que le rire, car avec un triste visage on peut avoir le cœur joyeux. Le cœur des sages est dans la maison du deuil, le cœur des insensés, dans la maison de la joie. (Ec 7, 2-4)

Le Vatican, clairement réfractaire à l’imposition de restrictions de circulation dans la « juridiction papale » combine frustrantes pour frustrantes une population déjà durement éprouvée dans son vécu quotidien par un ciment pour le vivre-ensemble complètement élimé (services publics vitaux évanescents voire disparus pour la majorité des familles défavorisées), ne s’accommoderait pas à la vue des dépenses somptuaires engagées sous le prétexte de revêtir la ville d’un costume de luxe pour la circonstance, brèche que le Malin exploite pour déteindre l’image de l’Église de Dieu.
N’est-ce pas que le pape François stigmatise la « communication numérique » qui contribue à « tout banaliser » … « et la diffamation et la calomnie », jusqu’à « évacuer » littéralement « toute éthique et tout respect de la renommée d’autrui », voire offrir à « l’agressivité sociale sans pudeur » … « un espace d’amplification hors pair dans les appareils mobiles et les ordinateurs » : … « le foisonnement de formes étranges d’agressivité, d’insultes , de mauvais traitements, de disqualifications, de violences verbales qui vont jusqu’à détruire l’image de l’autre… », bref, l’illusion de la communication ?
Alors que le Saint-Père n’a pas encore foulé le sol congolais, voilà déjà la toile enflammée par une vidéo de quatre minutes singulièrement incisive et caustique d’une bloggeuse de la diaspora congolaise, une patriote défenseuse acharnée de la cause kongolaise, un tantinet trublionne, qui, appelant les enfants de M’Fumu Kimbangu au boycott et au sabotage de la visite papale (sic !), crucifie le « président du Vatican » (sic !) au rang des puissances occidentales dominatrices qui néo-colonisent et exploitent Congo-Kinshasa (sic !) !
Le crime commis par le Vatican ? Le tout se serait passé, selon la révélation de l’auteure de la dénonciation, comme si le gouvernement congolais a priorisé les préparatifs de l’accueil du pape en y engloutissant plus de soixante-dix millions de dollars (sic !), aux dépens de la souffrance, des pleurs et de la vie des Congolais (sic !) !

3. Zachée (Lc 19, 4-5) et Bartimée (Mc 10, 46-49) en communion avec des millions de Lazare
mendiant du pays frappent à la porte du Saint-Père par l’entregent d’un Guetteur de la Nation.

Avec le sens de l’accueil, la confiance, la pugnacité et la ténacité rageuse de Zachée comme de Bartimée, il se tient sur le sycomore et embouche le cor pour souffler un haut-le-cœur du peuple d’en bas qui peste contre son exécrable fortune : la situation sociale est intenable, le corps social est entré en phase ultime de pourrissement dans tous ses organes, secteurs et segments par le grand mal de la corruption devenue endémique. Alors que l’effondrement de Congo-Kinshasa devient chaque jour irrémédiable et irréversible, s’enfle l’ interminable guéguerre entre les gladiateurs politiques de tous bords et de toutes sensibilités, toujours les mêmes, qui se battent pudiquement sous le fallacieux prétexte de la légitimité du pouvoir, une rengaine somnifère malheureusement cristallisée, plus à tort qu’à raison, même dans la Constitution du pays au rang des causes fondamentales du recul à tous égards et de la descente aux enfers de la société.

4. La météo socio-politique annonce un tsunami égalisateur des destins à un horizon très
proche, une révolution violente, une guerre de tous contre tous, sur le point de déferler sur le pays, ravageant indistinctement et irrémédiablement.

Des nuages chargés des colères s’accumulent dans le ciel congolais. Les gens de peu sont traités comme des ordures, sans qu’aucun sentiment de culpabilité n’affecte les gouvernants, complices de ce scandale.
La fracture sociale, devenue fossé social, est en train de se muer à un rythme effréné, en un immense abîme social qui sépare dangereusement et spectaculairement les deux sections d’un même peuple : le peuple d’en-bas avec quatre-vingt-dix-neuf pour cent de la population du pays ploie sous une sorte de tyrannie de groupe, cruelle et impitoyable, celle des membres de la ploutocratie, locataires et squatteurs de la calotte supérieure de la coupole institutionnelle du pays.
Regards indifférents et méprisants, ceux-ci sont le peuple d’en-haut soit à peine un pour cent des quelque cent millions d’âmes que compte le pays. La rue hurle, elle étouffe de frustration et de rage; elle veut en finir avec les systèmes de gouvernement incompétents et impunément prédateurs.

5. Les élites dirigeantes se noient dans des travers sociaux de la bêtise, du mensonge et de
la trahison, le peuple d’en bas trinque. Tous réconciliés en Jésus Christ ! Comment l’exhortation papale sera-t-elle entendue par les deux sections du même que tout oppose et le processus de la réconciliation des cœurs prendre effectivement et durablement corps dans un contexte institutionnel national marqué par une pauvreté massive et extrême, l’injustice sociale, l’exclusion, les inégalités, la discrimination, le tribalisme et tutti quanti ?

Longtemps résigné, le peuple d’en bas subit et perçoit le peuple d’en haut comme une caste d’oligarques sui generis, néo-esclavagistes, affameurs, devenus sourds et oublieux. Des figures socio-politiques marquantes des plus flamboyantes poussent l’outrecuidance jusqu’à se vanter d’avoir transformé le peuple d’en bas en des parias. Et les victimes vénèrent leurs propres bourreaux, des hommes et femmes dont les fortunes ont des origines criminelles et qui, majoritairement, savent toujours sentir le vent tourner à l’approche des virages.
Le président de la République, F.-A. Tshisekedi, s’en indignait vertement et crument un jour : « Je ne comprends pas pourquoi des gens meurtris, affamés, frappés par le chômage et tous genres de calamité, chantent à notre gloire alors qu’ils devraient nous exiger plus comme c’est le cas en Occident »

6. Le degré de délitescence morale des élites dirigeantes est si abyssal et la défiance du
peuple si généralisée que le bon rendement du travail du Semeur de la paix du Seigneur en terre congolaise en termes de fruits de la moisson, passe des efforts collectifs soutenus de mise en œuvre par des hommes et des femmes de bonne volonté d’un programme de dessouchage, d’amendement, de chasse aux oiseaux nuisibles aux cultures et tutti quanti, préparé en connaissance de cause à la lumière des données de terrain.

Les tueries et massacres des myriades d’enfants congolais innocents, perpétrés par ou avec la complicité des « Hérode Antipas » congolais des temps modernes, ne se comptent plus. La situation sécuritaire du pays empire chaque jour, mais les élites dirigeantes, dédaigneuses et insouciantes, se prélassent dans des palais somptueux. Au peuple d’en bas est servi le vin du pourrissement dans la coupe de « démoncrature » : le peuple est, au quotidien, gavé de scènes surréalistes.
Le décor est, à s’y méprendre, aux excès du clan biblique de Hérode (Mc 6,17-29), ainsi qu’analysé dans certaines études spécifiques consacrées à la décollation du Baptiste : « Jean, victime du caprice d’un roi, Hérode Antipas, un habile politique mais un faible, un personnage sans envergure, un jouet pour Hérodiade, une femme de tête, ambitieuse, tyrannique, une hyène : une vipère et magicienne, qui met son intelligence au service de sa haine contre le Baptiste. »
Hérode ne reflète-t-il pas ce funeste prototype de politique congolais contemporain, assoiffé du pouvoir pour le pouvoir, imperturbablement et complètement subjugué par les trois forces du mal : la passion, le pouvoir, la vie luxueuse, soit la convoitise de la chair, la convoitise des yeux (le pouvoir sans fin) et l’orgueil de la richesse » ?
Et la princesse Salomé « l’image de la jeunesse danseuse qui ne vit que pour plaire, n’existe que dans le miroir et les désirs des autres mais n’a rien dans la tête, s’en tient aux idées de sa mère et ne sait même pas quoi répondre quand Hérode lui offre un cadeau royal » ?

7. Dans un sol pétri de l’amour et de l’humilité, toute semence du bien commun de germe.
Le chemin du semeur de la paix dans la recherche de la réconciliation véritable entre les masses des gens de peu opprimés et piétinés et leurs gouvernants chefs de bande, réputés outrancièrement prédateurs ou chefs de clan hérodiens aux mœurs dissolues, totalement déconnectés des réalités du peuple ou n’ayant que mépris pour celui-ci mais inconditionnellement soumis au diktat ou comptables vis-à-vis de quelques maîtres obscurs, personnes physiques ou morales, tenus et vénérés comme garants inavoués d’une certaine stabilité de leur pouvoir.

Un gouvernement perçu par son peuple comme illégitime puisque formé des traîtres, des collabos et des profiteurs, ne pourra jamais emporter la confiance des citoyens et donc ne réussira pas à conduire à la réconciliation des cœurs.
De plus, des gouvernants « d’essence hérodienne » n’inspirent pas seulement de la défiance mais surtout de la haine. Qui aurait invité les disciples de Jean à chanter et danser le soir de la décollation du Baptiste, décapité sur ordre d’Hérode Antipas, à la demande d’Hérodiade et de sa fille Salomé ?

8. Le peuple de Dieu de Congo-Kinshasa a accueilli avec soulagement le prélude du
message papal délivré lors de la rentrée parlementaire au Vatican (9 janvier 2023), savoir son souci de voir cesser la violence à l’Est de la RD Congo, plaçant sa visite « sous l’espérance de la cessation des hostilités en privilégiant un dialogue », alors un dialogue en vue de la réconciliation des cœurs !

Le Pape François apporte au peuple de Dieu de Congo-Kinshasa le pain de l’ouverture du chantier de la paix durable et de l’espérance de la mise en œuvre de son programme de développement intégral, annonce le Père Rigobert Kyungu , qui postule « aux Congolais de travailler à la réconciliation entre eux et avec Dieu », et « au Souverain Pontife d’aider à démasquer et à dénoncer tout ce qui empêche le décollage de la RD Congo ». Et Mgr Ettore Balestrero, Nonce apostolique, de demander « aux Congolais de tourner la page et de se réconcilier entre eux, de ne pas rester concentrés sur le passé…; de penser au futur et chercher à construire les uns avec les autres, et pas les uns contre les autres » dans la suite du message papal de « condamnation de toutes les violences qui se font, même le pardon pour toutes les violences qui se font encore aujourd’hui »… pour marcher sur le chemin de la paix et mettre fin à tous les messages de haine …» mais plutôt « aider à se réconcilier et à construire ensemble un Congo meilleur, un Congo juste, un Congo plus développé ».
Le clou des préludes du message papal est fixé par l’archevêque métropolitain de Kinshasa, Fridolin Cal Ambongo Besungu : « Le Pape vient chez nous non pas comme un touriste, mais il vient comme le Pasteur universel. Il vient au nom du Seigneur. Son message sera essentiellement un message de réconfort considérant la réalité du peuple congolais, un peuple qui souffre dans sa partie Est du pays…pas seulement nous réconforter naïvement ; … ce sera aussi une invitation à la responsabilité d’un peuple qui souffre ;… cette souffrance du peuple congolais n’est pas une fatalité…»

9. Duc in altum, et laxate retia vestra in capturam ! Avance en eau profonde, fais prendre
le large à la barque Congo, dans l’unité et la concorde des pensionnaires du faîte du dôme institutionnel national, et jetez vos filets pour pêcher la réconciliation des cœurs !
La croisade de la réconciliation nationale devra par exemple aller au-delà du sésame de l’Union sacrée de la Nation, sortir de l’étreinte mortelle qu’a été ce cul-de-sac institutionnel réalisé au prix d’une cure de renforcement du faîte du dôme institutionnel mais, depuis, irrésistiblement en états de désagrégation précoce. La pauvreté absolue, massive et extrême de la population congolaise est l’obstacle le plus dirimant à la réconciliation.
La réconciliation est entendue comme un acte qui part de la profondeur du cœur de l’homme et qui constitue une exigence pour soi-même, savoir l’exigence d’humilité pour accepter de s’abaisser et de céder volontairement devant l’autre même quand on a raison ; l’exigence d’honnêteté vis-à-vis de soi-même pour reconnaître ses propres erreurs et ses propres insuffisances ; l’exigence d’intégrité pour respecter en public et en privé , les engagements pris vis-à-vis de l’autre partie ; l’exigence de pardon pour accepter de passer l’éponge sur les erreurs et les fautes de l’adversaire ou de l’ennemi ; l’exigence d’amour pour faire de nouveau confiance à l’adversaire et accepter de partager avec lui la même vision et les mêmes objectifs à atteindre.
Nombreux penseurs, dont Blaise Pascal et saint Augustin notamment, soutiennent : « La vie heureuse est le lieu commun que tous ambitionnent, mais quel moyen d’y arriver, quel chemin prendre pour y parvenir, c’est là que les hommes ne sont pas d’accord. »
Le Pape François rappelle une question séculaire combien lancinante : « Comment Dieu peut-il tolérer cette disparité ? Comment peut-il permettre que le pauvre soit humilié, sans lui apporter son aide ? Pourquoi permet-il à ceux qui oppriment d’avoir une vie heureuse alors que leur comportement devrait être condamné face à la souffrance du pauvre ? »
Et en paraphrasant le Saint-Père sur la situation particulière du Congo-Kinshasa, le questionnement soulève la honte ambivalente, la rage, la révolte, et met en exergue le côté heurté de tout discours sur la réconciliation entre les Congolais d’en haut et d’en bas : combien de fois nous voyons les pauvres dans les déchetteries récolter les fruits du gaspillage et du superflu, pour y trouver de quoi se nourrir ou s’habiller ! Des mauvais, insolents et superstitieux riches congolais détruisent même ces déchets de peur d’être ensorcelés par des fouilleurs des décharges. »

10. Le peuple de Dieu de Congo-Kinshasa s’abandonne, comme il sied, à la Providence (Mt 6, 33 :
Quaerite primum Dei regnum et justitiam suam) mais il est en droit de désirer et de travailler pour mener une vie heureuse à la sueur de son front. Il s’agit, faute de pouvoir supprimer la souffrance
Concomitamment à la recherche des voies de résolution de l’insécurité récurrente, la société doit relever le défi coupe-gorge (Sublata causa, tollitur effectus) de l’obligation de transformer l’enfer social terrestre des pauvres de Congo-Kinshasa en un havre de paix.
Semeur de la paix du Seigneur, le Pape François exhortait, depuis le Vatican le 13 juin 2019 dans son message pour la Troisième Journée Mondiale des Pauvres : « À toutes les communautés chrétiennes et à tous ceux qui ressentent l’exigence d’apporter espérance et réconfort aux pauvres, je leur demande de travailler pour que cette Journée Mondiale des Pauvres renforce chez beaucoup, la volonté de collaborer efficacement afin que personne ne se sente privé de proximité et de solidarité ».
Dans le champ congolais longtemps et profondément miné par les démons de la division et de la haine, le chantier « Toujours réconciliés en Jésus Christ au Congo-Kinshasa » mérite d’être pris en charge au Vatican sous le couvert d’une Intention Universelle du Saint-Père dans la période 2023-2025, par exemple, de manière à disposer que la proximité papale soit soutenue et permanente, organisée et durablement assurée à travers les réseaux d’action institutionnels de l’Église de Congo-Kinshasa qui opéreront en étroite et permanente collaboration avec les services du Saint-Père !

11. En foulant le sol congolais, le Saint-Père entre dans l’un des « sanctuaires de la pauvreté, de la
misère, de la souffrance humaine » et passant par devant les habitations des pauvres , il verra et palpera la décharge humaine : « Devenus eux-mêmes partie d’une décharge humaine, les pauvres ils sont traités comme des ordures, sans qu’aucun sentiment de culpabilité n’affecte ceux qui sont complices de ce scandale. Souvent considérés comme des parasites de la société, on ne pardonne pas même aux pauvres leur pauvreté. … Ils ne peuvent pas se permettre d’être timides ou incapables, ils sont perçus comme menaçants ou incapables, simplement parce qu’ils sont pauvres. Le drame dans le drame, c’est qu’ils ne sont pas autorisés à voir la fin du tunnel de la misère… »
Derrière les replâtrages et badigeonnages des façades et devantures des installations bordant les principaux artères de la mégapole de Kinshasa, le spectacle désole : simplement répugnant, hallucinant, cauchemardesque aux yeux du monde entier excepté le Congo lui-même ! La vue des bidonvilles immondes est l’exacerbation de l’invasion du fantôme du précariat qu’un idéologue politique congolais, Alphonse Kangafu, dépeignait déjà dans les années Délire (1990) : pauvreté considérée comme normale, cité aux habitats en matériaux de fortune ou de réemploi, tous entremêlés, noyés sous des montagnes d’immondices, sans eau courante ni dispositifs d’assainissement, et où survivent dans une promiscuité indescriptible des familles nombreuses, formant un véritable lumpenprolétariat.

12. Ces cités de pauvres sont impunément établies sur des sites érosifs ou inondables en zones
pourtant classifiées « non aedificandi », où l’effort d’urbanisation est plutôt approximatif voire fugace et la viabilisation aléatoire et précaire. Engluées dans un contexte de précarisation permanente des conditions de vie, les populations y vivent sous l’étreinte d’une angoisse permanente, étouffant par exemple de peur-panique au moindre signe météo annonciateur d’orages et déluges, ces pluies diluviennes devenues particulièrement dévastatrices et meurtrières, à l’intensité et à la fréquence quasi-quotidienne exceptionnellement élevées,
Le tableau est apocalyptique, conséquence de l’incompétence et l’incurie des élites dirigeantes durant les trois dernières décennies, de leur orgueil, leur dédain, leur insolence, leur indifférence voire leur inhumanité, tous travers comportementaux résultant sur la disparition de l’autorité de l’État.

Au Saint-Père de faire entendre à l’aréopage des figures socio-politiques marquantes du pays venues à sa rencontre l’ultime haut-le-cœur du peuple d’en bas, la rage des masses des gens de peu désespérément en déshérence et les presser à prendre au grand sérieux cette situation sociale explosive !

13. N’y aurait-il pas un seul représentant du peuple congolais qui soit sage et généreux ? Où sont les
parlementaires congolais proches du peuple d’en bas, qui se disposent à libérer spontanément un haut-le-cœur jaculatoire de la nature et de l’intensité de celui dont se fendit par exemple l’illustre tribun français Victor Hugo, alors lui-même soulevé par le dédain et l’insouciance de ses contemporains représentants du peuple face à une misère ambiante indicible ?
N’y aurait-il pas un seul qui soit mû par un volontarisme d’airain et un réalisme de vérité et qui , plagiant – pourquoi pas – la trame de l’historique discours de Victor Hugo à l’Assemblée Nationale française en date du 9 juillet 1849, soit 60 ans après la Révolution française du 14 juillet 1789?
Le « Sauveur du peuple de Congo-Kinshasa » susciterait ainsi à sa manière, quelque 60 ans après l’accession du Congo à la souveraineté nationale et internationale, un mouvement d’éveil de la conscience nationale qui cristalliserait les idées, forces et énergies d’un reste abrahamique d’élites dans la voie de la refondation de la nation ! Alors, pour la première fois le peuple reconnaîtrait dans ses représentants
Institutionnels des hommes et des femmes dignes de porter des « titres et qualités respectifs (sic !) : honorable, excellence, distingué, éminence, général, principal, spécial, privé…et tutti quanti »!

14. Vivement des lois contre la misère ! Un parlementaire congolais généreux que l’on surnommerait
papa Victor, papa Molière, papa Social ou autre, reprendrait le texte de Victor Hugo aux du jour et dans le contexte congolais : « Je ne suis pas, Messieurs, de ceux qui croient qu’on peut supprimer la souffrance en ce monde; la souffrance est une loi divine; mais je suis de ceux qui pensent et qui affirment qu’on peut détruire la misère. Je ne dis pas diminuer, amoindrir, limiter, circonscrire, non, je dis « détruire ». La misère est une maladie du corps social comme la lèpre était une maladie du corps humain; la misère peut disparaître comme la lèpre a disparu. Détruire la misère ! Oui, cela est possible. Les législateurs et les gouvernants doivent y songer sans cesse; car, en pareille matière, tant que le possible n’est pas fait, le devoir n’est pas rempli. Tant que l’usure dévore nos campagnes ! Tant qu’on meurt de faim dans nos villes…Vous n’avez rien fait, rien fait, tant que dans cette œuvre de destruction et de ténèbres, qui se continue souterrainement, l’homme méchant a pour collaborateur fatal l’homme malheureux…Vous le voyez, Messieurs, je le répète en terminant, ce n’est pas seulement à votre générosité que je m’adresse, c’est à votre sagesse. Messieurs, songez-y, c’est l’anarchie qui ouvre les abîmes, mais c’est la misère qui les creuse. Vous avez fait des lois contre l’anarchie, faites maintenant des lois contre la misère! » ?
Le peuple du Congo est en droit d’exiger à son tour que ses élus lui servent des lois contre la misère ! Et au-delà des lois, le travail de mise en œuvre effective des lois et des réformes essentielles.
Les libertés qu’apporte la démocratie resteront des coquilles vides si elles ne s’accompagnent pas d’une amélioration réelle et tangible des conditions de vie matérielles de millions de citoyens ordinaires de ces pays, avertissait Nelson Mandela.

Au Saint-Père d’interpeller ouvertement et fermement l’aréopage des figures socio-politiques marquantes du pays venues à sa rencontre dans l’espoir de susciter des « Zachée » selon le plan merveilleux et éternel de Dieu pour son peuple de Congo-Kinshasa, et leur demander instamment de prendre la situation au grand sérieux !

15. Puisqu’il sied de tirer des leçons des expériences réussies par d’autres nations, au lieu d’une union
sacrée « de façade » des figures socio-politiques marquantes du pays, si représentatives soient-elles, le Congo ne pourra survivre et renaître qu’au prix d’un exploit comparable à celui du 4 août 1789 français, la date la plus fameuse de l’histoire parlementaire française, jour où, « la Révolution inscrite dans les esprits se construisit dans les faits ».
L’heure a sonné de payer le prix de la véritable réconciliation des cœurs, d’engager la « révolution congolaise », celle inscrite dans les faits de la société depuis les années de braise 1990 (Conférence Nationale Souveraine) – mais une révolution pacifique et de rupture -, de faire comme le voulurent et réalisèrent les Français en 1789 : « le plus grand effort auquel ne se soit jamais livré aucun peuple afin de couper définitivement pour ainsi dire en deux notre destinée et séparer par un abîme ce que nous avons été jusque-là » de ce que nous voulons être désormais » (A. de Tocqueville).
« Tous les cœurs, animés du plus saint enthousiasme, comme le décrivent aujourd’hui les meilleurs historiens et autres experts de France, virent tous les ordres confondus annoncer ce mélange heureux des enfants de la mère commune : les députés firent trêve à la Constitution et abolirent les privilèges, tous les privilèges, quels qu’ils soient, des personnes, des villes, des provinces et des corporations. En une séance historique, l’assemblée constituante abolit la société de privilèges, ordre multiséculaire sur lequel reposait l’Ancien Régime, régime féodal, une société divisée alors en trois ordres et reposant sur la notion de privilèges : la noblesse, le clergé, le tiers état.
Le texte final du 11 août 1789 consacra tout de go et dans une formulation univoque en son article premier, la volonté commune : l’Assemblée nationale détruit entièrement le régime féodal. »

Au Saint-Père d’interpeller ouvertement et fermement l’aréopage des figures socio-politiques marquantes du pays venues à sa rencontre dans l’espoir de susciter des « Zachée » selon le plan merveilleux et éternel de Dieu pour son peuple de Congo-Kinshasa, et de leur demander instamment d’examiner en âme et conscience à quel niveau ils entendent prendre part à la croisade pour la révolution congolaise, pour la construction l’Arche de Noé !

16. Que le Saint-Père, Semeur de la paix, interpelle ouvertement et fermement l’aréopage des
figures socio-politiques marquantes du pays alignées aux premiers rangs des assemblées, gouvernants et législateurs principalement, hommes et femmes pour la plupart sans amour ni humilité et qu’il leur délivre l’ultime haut-le-cœur du peuple d’en bas en avertissant, apostrophant, menaçant et en les exhortant instamment à prendre la situation au grand sérieux et à engager le processus de remise en l’endroit de la marche du pays et cela, sur le ton de vérité « …Engeance de vipères, qui vous a suggéré d’échapper à la Colère prochaine ? » (Mt 3,7 & Lc 3,7) qu’usa Jean-Baptiste répondant à la question des foules, Pharisiens et Sadducéens, des publicains, des soldats et des foules : « Que nous faut-il donc faire ? » (Lc 3,10), même si nombre de ses interlocuteurs pourraient s’assombriront et s’en iront contristés comme le jeune homme riche de la Bible, car ayant de grandes fortunes (Mc 10,22) !

17. Qu’il plaise au Saint-Père d’écouter aussi la voix de Guetteur de la Nation portée par un fidèle laïc
du Diocèse de Kisantu, Paroisse Saint Jean-Apôtre, en zone territoriale de la ville de Kinshasa, Johannes Ludovicus Bongungu, qui embouche le cor non d’un rabat-joie mais celui de l’enfant de la maison Congo-Kinshasa en deuil.
Nul n’est prophète en son pays. De vives et tenaces contrariétés le submergeront à coup sûr. Comme il souhaiterait tant avoir eu tort ou avoir mal lu les signes de temps pour, en définitive, être reconnu demain un bon politicien, capable de prédire l’avenir et, par la suite, également capable d’expliquer pourquoi les choses ne se sont pas passées comme il l’avait prédit (W. Churchill).
Le spectre d’un effondrement imminent l’a criblé comme une partie de battue: le doute le pénètre et le vrille au point où, perplexe, il s’interroge désespérément : « Suis-je encore utile à quelque chose ? ». Il veut, à la manière de Zachée et de Bartimée, utiliser un moyen révolutionnaire pour hâter l’anticipation sur le tsunami dévastateur qui menace la nation.
Ni frustré de n’avoir obtenu la place qu’il mérite ni avide de quelque reconnaissance ni de nouveau succès ni complexé du fait de ne pas porter quelque mandat électif ni surtout compté parmi des figures marquantes de l’Union Sacrée de la Nation mais bien volontiers candidat membre promoteur de la Véritable Union Sacrée de la Nation, celle véritablement sacrée à nouer et sceller impérativement aujourd’hui encore entre le peuple d’en haut et le souverain primaire, le peuple d’en bas en vue de la véritable réconciliation des cœurs !
Sa position se trouve confortée quand Montesquieu note que « la souveraineté populaire est une, indivisible, inaliénable, irreprésentable, et absolue. La représentation produit une élite de la politique qui va s’autonomiser et fonctionner par esprit de corps. D’où, un phénomène de corruption et usurpation ! …Le contrat social ne saurait prendre la forme d’une délégation, sinon la liberté serait perdue. »

18. Salve, Papa Francisce ! Salve, pauperum amator ! Salve, Christi pacis seminator, salve !
Tolle, lege ! Tolle, lege ! Tolle, lege !
« …Va prendre le petit livre ouvert dans la main de l’Ange debout sur la mer et sur la terre. » … « Tiens, mange-le ; il te remplira les entrailles d’amertume, mais en ta bouche il aura la douceur du miel. ». Je pris le petit livre de la main de l’Ange et l’avalai ; dans ma bouche, il avait la douceur du miel, mais quand je l’eus mangé, il remplit mes entrailles d’amertume. » (Ap 10, 8 -10)

Diocèse de Kisantu – Paroisse Saint Jean-Apôtre, le XXX Janvier de l’an de grâce MMXXIII

Johannes Ludovicus Bongungu
Guetteur de la Nation RD Congo

Viens, Saint-Père ! Viens pleurer (Rm 12,15) avec le peuple de Dieu qui pleure au Congo-Kinshasa ! Viens dans sa maison du deuil plutôt que dans celle du banquet ! Lève les yeux vers le sycomore de Zachée (Lc 19, 4-5) et jette un œil sur la souffrance du peuple gisant comme dans une étendue infinie d’ossements desséchés (Ez 37, 4-6) ; tends l’oreille au cri de Bartimée (Mc 10, 46-49) !

« Qu’ils sont beaux, sur les montagnes, les pieds du messager qui annonce la paix, du messager de bonnes nouvelles qui annonce le salut, qui dit à Sion : ‘‘Ton Dieu règne.’’ C’est la voix de tes guetteurs : ils élèvent la voix, ensemble ils poussent des cris de joie, car ils ont vu de leurs propres yeux Yahvé qui revient à Sion. » (Is 52, 7- 8)

19. Viens, Évêque de Rome ! Viens, Pape François ! Viens, Semeur de la paix du Seigneur ! Viens
apporter compassion et consolation ! Viens semer l’espérance qui fasse sauter la lassitude, l’abattement et l’incrédulité morbide du peuple Congolais, tant éploré et divisé contre lui-même qu’il est, ruiné par des décennies de conflits à répétition, sociaux, politiques et surtout armés !

20. Viens, Saint-Père, consoler et soutenir l’Église de Congo-Kinshasa, qui peine à délivrer la
nation de l’emprise des légions des démons de l’égarement, de la division et de la domination ! Viens et vois combien ces forces du mal ne reculent ni ne frémissent malgré les montagnes d’incessantes et instantes prières du peuple de Dieu dans sa diversité de confessions !

21. Regarde, Saint-Père, et vois combien nos communautés chrétiennes sont infiltrées par des
armées de mercenaires, de voleurs et de loups ravisseurs en vêtements d’agneau : combien ils sont nombreux, ces faux prophètes, ces faux pasteurs et ces faux apôtres, qui travaillent par et pour l’esprit de l’erreur (1 Jn 4,5-6), qui prophétisent plutôt pour des personnes et les dupent », débitent les visions de leur cœur, rien qui vienne de la bouche de Dieu (Jr 23,16) ! faux docteurs, faux évangélistes tous plus séducteurs les uns plus que les autres
Oui, Saint-Père, soutiens de manière particulière l’Église de Congo-Kinshasa, tout criblée qu’elle est comme le froment : « cette espèce (de démons), on ne la fait sortir que par la prière et par le jeûne » (Mt 17,21) !

22. Visite, Saint-Père, le peuple de Congo-Kinshasa, terre africaine à la réputation de Capharnaüm
confrontée à la fois aux affres d’un désordre intérieur institutionnalisé et aux agressions et sièges par les démons de l’humanisme sans Dieu, des fausses idoles de l’autocréation et de l’auto-rédemption, que le pape Benoît XVI appelait instamment l’humanité croyante à exorciser en mettant fin à l’instrumentalisation de la nature et des hommes du point de vue de l’utilité économique et de la manipulation politique et médiatique de la pensée dans un monde dépourvu de lien éthique et moral dont les communautés humaines sont dramatiquement dépourvues aujourd’hui !

23. Viens, Saint-Père, répandre le grain de la réconciliation des cœurs au milieu du peuple de Dieu au
Congo-Kinshasa, assiégé et ravagé par des vagues récurrentes de hordes de vampires, de mafieux et de criminels, au nombre desquels se comptent des enfants du pays comme des étrangers, auteurs de razzias et de massacres innommables !

24. Viens, Saint-Père, réarmer le peuple de Congo-Kinshasa naufragé, relégué et ravalé au rang de
souffre-douleur des nations hégémoniques et suprématistes, gisant comme un objet de risée et des balayures du monde ! (la fable et le jouet des voisins en Afrique et dans le monde).Et pour son renflouage moyennant la réconciliation des cœurs, « Tous réconciliés en Jésus Christ », daigne lui inculquer ton option en trois voies pour la construction de la paix à travers l’élaboration d’un pacte social, à savoir :
• Le dialogue entre les générations comme base pour la réalisation de projets communs ;
• L’éducation en tant que facteur de liberté, de responsabilité et de développement ;
• Le travail pour une pleine réalisation de la dignité humaine !

25. Que la densité du vernis de l’allégresse du peuple de Kinshasa ne dissolve l’épaisse chape de l’immense de chagrin,
de sourds gémissements et de pleurs amers de la maison Congo qui pleure sur la myriade de ses enfants disparus et porte interminablement leur deuil !
Viens, Saint-Père, enseigner le peuple de Congo-Kinshasa tout ouïe dans sa diversité ethnique, communautaire, culturelle, spirituelle, religieuse ! Mais qu’est-ce qu’il n’a pas déjà entendu, sinon reçu en écho ? Il a presque tout entendu ou lu de l’Évêque de Rome à travers Lettres Encycliques, Déclarations, Exhortations, adresses Urbi et Orbi, adjurations générales, spécifiques ou spéciales, signées et lancées depuis Rome et même à l’occasion des visites papales (saint Jean-Paul II en gratifia le peuple de Congo-Zaïre de deux, en mai 1980 et août 1985).
Aujourd’hui, tu viens, Saint-Père, exhorter le peuple de Dieu éploré. Ce Congo martyr ravagé et en pleurs, c’est en premier sa région orientale cruellement et systématiquement razziée, terrorisée, écumée, infiltrée, envahie et occupée.

Mais le programme de la visite papale étant délesté de l’étape de la ville de Goma, sans conteste le véritable clou dans la symbolique de « Tous réconciliés en Jésus Christ », à la suite de l’extrême aggravation du niveau et de l’étendue de l’insécurité dans la région, daigne, Saint-Père, veiller à ne pas laisser l’épais vernis de l’atmosphère d’allégresse populaire du peuple de Kinshasa occulter l’immense chagrin de la maison Congo perpétuellement en deuil au point d’édulcorer et détourner le focus de nos intentions de prière de la quête du fruit de la paix de la saison des années 1970-1980 dont le goût est fané ou plutôt disparu du palais du peuple de Congo-Kinshasa des années 2000 ! La réconciliation des cœurs est un jeu de saut d’obstacles, et le chemin vers la paix ne ressemble pas à un long fleuve tranquille.

26. Une nation dangereusement divisée contre elle-même – Deux sections d’un même peuple que tout oppose, se font
face et se regardent en chiens de faïence : d’un côté, le peuple d’en-haut et, de l’autre, le peuple d’en-bas.
Oui, le peuple qui s’amasse à perte de vue, chante, danse et accueille le Saint-Père François avec des chaleureux Yambi-Yambi, ressemble en réalité à une population de zombies, des ossements desséchés ; c’est le peuple d’en bas, celui majoritairement des gens de peu, des ruinés, des affamés, des faibles, des pauvres, des oubliés, des loqueteux, des piétinés, des hachés, tous ceux qui se tiennent debout et attendent le go des conducteurs, le peuple d’en haut, pour pouvoir enfin, à leur tour, prendre le train de la paix que saint Paul VI a appelé du nouveau nom de développement intégral.
Oui, le peuple de zombies s’abandonne à la Providence : « Il me dit : ‘‘ Prophétise sur ces ossements. Tu leur diras : Ossements desséchés, écoutez la parole de Yahvé. Ainsi parle le Seigneur Yahvé à ces ossements. Voici que je vais faire entrer en vous l’esprit et vous vivrez. Je mettrai sur vous des nerfs, je ferai pousser sur vous de la chair, je tendrai sur vous de la peau, je vous donnerai un esprit et vous vivrez, et vous saurez que je suis Dieu.’’ » (Ézéchiel 37, 4-6)

27. Congolais, tous, coupables de la faillite du Congo – Les uns et les autres, tous comme abrutis : riches et puissants
par l’opulence ou l’omnipotence, et pauvres et faibles par l’indigence ou la servitude !
Oui, la ville et l’auditoire de l’Évêque de Rome en visite au Congo-Kinshasa seront sans doute tout en couleurs de joie et embellis au mieux que faire se peut mais cela contrastera cruellement avec le décor du chagrin : larmes, cendres, vêtements déchirés. Mais ce côté rutilant n’est que façade trompeuse d’un corps social profondément miné, nécrosé, métastasé, sur le point de s’effondrer.
Certes, se masseront aux places d’honneur des assemblées les hommes et les femmes élevés en dignité : des locataires et squatteurs des palais de la République, gouvernants comme législateurs, des dignitaires ecclésiastiques, des élites religieuses et morales, élites intellectuelles et scientifiques, élites artistiques, élites techniques, élite politique, leaders des corporations professionnelles et syndicales, leaders d’opinion. Ainsi se tiendront en même temps en face du Saint-Père les principaux responsables et coupables de la mort du Congo.

Le verdict est, en effet, sans appel : les élites nationales ont failli et leur appliquer le mantra « tous coupables » ne serait ni injuste ni excessif, tous coupables de l’effondrement de la nation par notre attitude d’indifférence, d’indolence et d’irrésolution quand ce n’est pas l’inanité, avec pour conséquence, consacrant comme une fin de saison politique apocalyptique pour les enfants du Congo, depuis 2021, l’emballement étourdissant de la machinerie institutionnelle qui a déferlé dans tous les domaines et secteurs de la vie nationale et une énorme chienlit née presque subitement allant crescendo et se répandant à la vitesse microbienne.
Cette pagaille semble même entretenue à un niveau tel que des méfaits et travers d’une extrême gravité sont ostensiblement et bruyamment commis par nombre de hauts cadres particulièrement sadiques et de compatriotes insolemment inciviques, tous feignant de garder leur conscience tranquille, les uns dans l’exercice de leurs fonctions et les autres dans la vie de tous les jours. Pire tout cela ne semble nullement tant cabrer l’opinion, ni heurter la conscience collective de la population ni même soulever une seule âme de révolutionnaire.

28. La défiance est abyssale. La réconciliation des cœurs, une gageure – Oui, c’est même un euphémisme de
relever que le champ congolais n’est plus propice à la germination de la graine de la réconciliation des cœurs. Il est même devenu quasi stérile. Tout le monde assiste benoîtement au spectacle ahurissant d’un cataclysme rampant. Les gouvernants semblent totalement incapables de construire et d’incarner la confiance. Les masses, quant à elles, ne sont plus convaincues de la sincérité des préoccupations affichées par les gouvernants. C’est dans un climat de défiance généralisée que depuis ces dernières années un orage encore imperceptible mais impétueux et imprévisible secoue la société, faisant cristalliser sournoisement l’instabilité institutionnelle, paralysant la marche déjà bancale du gouvernement à la direction timorée et indécise, exacerbant les tensions dans l’activité parlementaire comme dans celle de l’appareil judiciaire, et accroissant considérablement les incertitudes et le désarroi des masses.

29. L’hypothèque sur l’union de la nation est très lourde : l’abîme social. La grande fracture sociale, devenue
fossé et aujourd’hui abîme, sur les deux fronts de la conflagration qui couve, les deux peuples se font dangereusement face mais ne jurent chacun que par la précipitation de l’autre dans un précipice : éliminer les puissants pour les uns et ignorer les plus faibles pour les autres ! Le raccourci le plus souvent emprunté par l’ensemble des plus faibles, c’est la révolution violente. Il urge de trouver un chemin entre les deux précipices, le chemin de la réconciliation entre les deux peuples , le peuple d’en haut et le peuple d’en bas !

30. Un puissant démon de la division se dresse irrémédiablement sur le chemin qui mène à la
réconciliation des cœurs : le spectre du tsunami social qui couve dans les entrailles du tissu social. Un songe diurne invariablement torturant, qui touche le destin immédiat du peuple. Ce qui est en cause dans ce tableau apocalyptique, c’est substantiellement la survie même du Congo, celle de son Peuple, mieux de ses deux peuples en présence, qui se vouent une inimitié tenace et implacable, qui sont constamment en guerre latente mais qui n’ont jamais été aussi proches qu’aujourd’hui d’en découdre mortellement.
Un tsunami social dévastateur affleure effroyablement à l’horizon, la guerre de tous contre tous : « Horreur ! Horreur ! Horreur ! S’il fallait qu’une classe fût mangée, n’était-ce pas le peuple, vivace, neuf encore qui mangerait la bourgeoisie épuisée de jouissance ? »

Le tout se passe, en effet, comme si les figures proéminentes du gotha politique, les autorités morales (sic !) en tête, sont toutes déconnectées des réalités du pays et de la société congolaise au point de ne pas comprendre le sentiment de frustration qu’éprouvent les gens de peu. Ces classes dirigeantes insouciantes, sourdes et aveugles, égoïstes et narcissiques, cruelles et néo-esclavagistes, feignent d’ignorer ou de défier l’existence de cette bombe à retardement, de minimiser l’ampleur de dégâts qu’elle est susceptible d’occasionner en cas d’explosion ou de ne pas voir l’imminence de l’atteinte du point d’achèvement, c’est-à-dire le point de l’irréversibilité de l’hideux processus de
pourrissement du Congo.
Pareille cécité et surdité font douter des lendemains et inclinent à confirmer le spectre de l’effondrement imminent de Congo-Kinshasa par la faute des générations de nos dirigeants politiques, héritiers chaque fois des colères accumulées mais curieusement naïvement ivres de l’enthousiasme des foules.

31. Oui, le Congo-Kinshasa est gravement malade de ses dirigeants, gouvernants et législateurs,
dédaigneux et arrogants, qui se méprennent royalement sur la vraie nature du peuple congolais, ce peuple scandaleusement indolent mais à l’émotion extraordinairement imprévisible. L’histoire enseigne par exemple, que la réalité d’un ciel sans nuages au Congo belge des années 1950 ne fut qu’illusoire et trompeuse, que lorsque les Belges voyaient en 1955, lors du voyage du Roi au Congo, les foules congolaises manifester un enthousiasme et un loyalisme unanimes, lorsqu’ils entendaient monter vers le Roi les acclamations, ils ne pouvaient pas deviner que, quatre ans plus tard, ces mêmes foules clameraient des slogans nationalistes. À vrai dire, personne ne l’avait deviné. Il est, en effet, de ces grands soulèvements collectifs qui, faute de signes prémonitoires, sont pratiquement imprévisibles. Il en est de même du Congo indépendant de nos jours : un tsunami social égalisateur des destins couve et pourrait submerger le pays !

32. Quelles élites dirigeantes à l’oreille dure et au cœur endurci écouteront et entendront le
message de Semeur de la paix du Seigneur ? Quelle réponse les chrétiens et tous les hommes de bonne volonté de Congo-Kinshasa entendent-ils, à travers leurs chaleureux Yambi-Yambi, réserver concrètement au message de consolation que l’Évêque de Rome apporte ?
Le péricope du message du Pape François sur le « Dialogue entre générations pour construire une paix durable » sont ces paroles du prophète Isaïe, lesquelles expriment la consolation, le soupir de soulagement d’un peuple exilé, épuisé par la violence et les sévices, exposé à l’indignité et à la mort. Le Saint-Père y exhorte le monde à construire une paix durable, qui est à la fois « un don du ciel et le fruit d’un engagement commun ».
Aujourd’hui, le Pape François vient exhorter les peuples de Congo-Kinshasa, en premier le peuple d’en haut mais en même temps également le peuple d’en bas, celui des gens de peu, à s’engager enfin durablement à leur tour dans le chemin de la paix que saint Paul VI a appelé du nouveau nom de développement intégral.
Le Saint-Père François nous a déjà proposé trois voies pour la construction de la paix – à travers l’élaboration d’un pacte social -, à savoir : (1) le dialogue entre les générations comme base pour la réalisation de projets communs ; (2) l’éducation en tant que facteur de liberté, de responsabilité et de développement ; (3) le travail pour une pleine réalisation de la dignité humaine.

33. La semence du triptyque de construction de la paix « Dialogue – Éducation Travail » prêché par le
Pape François ne pourra pas germer en terre congolaise avant d’apporter des améliorations substantielles aux labours initiaux et autres réalisés au cours des décennies précédentes.
L’Histoire renseigne que Congo-Kinshasa engendré à la Conférence de Berlin en 1885, devenu État Indépendant du Congo (1885-1908), ensuite Congo belge (1909-1960), a acquis sa souveraineté et son indépendance le 30 juin 1960.
Baptisé République du Congo (1960-1964), puis République Démocratique du Congo (1964-1971), ensuite République du Zaïre (1971-1997), et devenu à nouveau République Démocratique du Congo (depuis 1997), il est encore habité par un peuple qui, à cause de la mal gouvernance, au fil des ans, a perdu sa dignité et garde toujours son front courbé.
L’Église du Congo n’a pas impacter significativement la marche nationale depuis 1885 alors que de la naissance de la Doctrine Sociale de l’Église en 1891 jusqu’aux travaux de Vatican II (1962-1969) en passant par la deuxième guerre mondiale, elle dispose d’une source intarissable d’orientations : la DSE est née de la réflexion de l’Église sur les temps modernes et leurs difficultés particulières eu égard au souci permanent de mise en œuvre concrète de l’Évangile au quotidien dans la société, d’adaptation à son époque et à ses besoins spécifiques.
Elle s’est développée du pape Léon XIII à nos jours, en trois étapes marquantes, en réponse aux problèmes de la condition ouvrière et des idéologies politiques, d’abord, de 1891 à la deuxième guerre mondiale, puis autour du Concile Vatican II (ouvert par le pape Jean XXIII en octobre 1962 et clôturé par le pape Paul VI en décembre 1969) jusqu’aux années 1980 ; enfin avec le Catéchisme de l’Église Catholique et les trois derniers papes, contemporains des générations actives , Jean-Paul II, Benoît XVI et François, dans une humanité qui connaît de plus en plus la mondialisation.

34. Quel fascinant décor de reformation du Congo se trouve ainsi planté depuis la maternité du Congo indépendant !
Est-ce par simple coïncidence ? Il est, néanmoins, permis, sans juger, d’y lire quelques bonnes dispensations de la Providence et de le mettre en exergue pour souligner combien la responsabilité de l’échec congolais doit être partagée par toutes les élites et principalement les élites politique et religieuse. Il est opportun de faire résonner en écho en le paraphrasant la voix du célèbre socialiste français Jean Jaurès : Congolais, prompts à détester votre pays et son histoire, écoutez la grande voix du Guetteur de la Nation : « Ce qu’il faut ce n’est pas juger toujours, juger tout le temps, c’est se demander d’époque en époque, de génération en génération, de quels moyens de vie disposaient les hommes, à quelles difficultés ils étaient en proie, quel était le péril ou la pesanteur de leur tâche, et rende justice à chacun sous le fardeau » ! Le constat d’échec national des générations successives d’élites dirigeantes incline à se demander pourquoi la très longue marche congolaise a été perpétuellement entravée : est-ce par une incompatibilité consubstantielle ou un désamour tenace par rapport à la culture de bon gouvernement ?

Pourquoi la très longue et laborieuse marche à vue a-t-elle été perpétuellement erratique, heurtée et entravée : est-ce par une incompatibilité consubstantielle ou un désamour tenace dans le couple des élites nationales et de la culture du bien commun ?

« Le bien commun demande qu’il y ait une autorité dans la société, et qu’elle soit confiée à des hommes (et des femmes) qui l’exercent au mieux dans l’intérêt public »

35. Les éphémérides de l’an 1885 ressortent, entre autres, la naissance et le baptême du Congo sous le
nom État Indépendant du Congo (EIC), et une encyclique du Pape Léon XIII dont cet extrait stipulant que le gouvernement idéal, parfait, applicable à chaque peuple, n’existe pas : « Le droit de commander n’est en soi nécessairement lié à aucune forme politique. Il peut fort bien s’adapter à l’une ou l’autre, pourvu qu’il soit, en fait, apte à la réalisation de l’intérêt et du bien général. Mais quelle que soit la forme de l’État, tous les gouvernants doivent absolument avoir le regard fixé sur Dieu, suprême gouverneur du monde et, dans l’administration de la cité, le prendre pour exemple et pour loi.’’ ( Encyclique Immortale Dei ).
Pour un peuple déterminé et dans un temps donné, le meilleur régime politique sera celui qui, à la fois, est le plus conforme au caractère de ce peuple et à ses traditions nationales, et lui assure de fait le bonheur temporel qui est la fin de la société civile. Ainsi, en principe, tout gouvernement qui respecte les droits de Dieu et de l’Église, ainsi que les droits imprescriptibles de la personne humaine, peut être bon.
Mars 1885, paraît le roman d’un penseur engagé français Émile Zola au titre de Germinal pour traduire (étymologiquement) la germination, la renaissance de forces nouvelles, et (historiquement) une révolution populaire (1795) ; ou encore un mois du calendrier révolutionnaire (début du printemps). Il porte à la fois le récit de l’affrontement entre deux grandes forces antagonistes, le Capital et le Travail, et la révolte en germe des ouvriers se rassemblant, grâce à une prise de conscience collective, et sortant de la terre, comme les végétaux, lentement mais sûrement ; et la germination printanière devenant révolte ouvrière.

36. Le Congo traîne, comme un boulet terriblement pesant qui entrave sa navigation, un double péché
des origines en rapport à sa destinée et à sa construction : le pays ne s’est jamais donné ni un destin commun propre ni un régime politique qui soit conforme à la fois conforme au caractère de son peuple et aux traditions nationales, lequel soit à même de lui assurer le bonheur temporel qui est la fin de la société civile.
C’est sans équivoque ni ambages qu’en 1960 le Premier ministre, P.E. Lumumba confessa expressis verbis : : Nous n’avons pas choisi les voies de la facilité mais celles de la fierté et de la liberté de l’homme. Nous avons compris que tant qu’un pays n’est pas indépendant, tant qu’il n’a pas assumé son destin, il lui manque l’essentiel. Et ceci reste vrai quel que soit le niveau de vie des colonisés, quels que soient les aspects positifs d’un système colonial. Notre volonté d’indépendance rapide sans période intermédiaire, sans compromis, nous l’avons imposée avec d’autant plus de force que nous avions été davantage niés, dépersonnalisés, avilis.
À quoi nous aurait servi d’ailleurs de tarder, de pactiser davantage alors que nous avions pris conscience de ce que tôt ou tard, il faudrait tout revoir, tout repenser par nous-mêmes, créer des structures nouvelles adaptées aux exigences d’une évolution proprement africaine et reconvertir les méthodes qui nous avaient été imposées et surtout nous retrouver nous-mêmes, nous débarrasser d’attitudes mentales, des complexes, d’habitudes dans lesquels la colonisation nous avait maintenus durant des siècles ?

37. Les leaders politiques congolais des années 50 firent quasiment chorus sur ce front de la lutte, les
meurtrissures de l’exploitation inhumaine et éhontée étaient encore si vives que l’indépendance n’était plus question sujette à discussion. L’intransigeance et l’agressivité des propos tenus par Joseph Kasavubu, futur président de la République, à la Table ronde de janvier 1960 à Bruxelles, ne manqua pas de surprendre le monde : « Messieurs, nous ne sommes pas venus à Bruxelles pour discuter de l’indépendance, mais pour la passation des pouvoirs ».
Pour la Ligue des Évolués catholiques du Congo (LEC), auteur de « le Manifeste » publié le 30 juin 1956 dans le journal « Conscience africaine » la position congolaise est de réclamer le respect de la dignité humaine bafouée et de mener une réflexion responsable sur la situation sociale et politique de la société congolaise et une analyse concrète pour en discerner les « signes des temps » !
Dans sa conférence sur « L’âme de l’Afrique noire » à l’Exposition Internationale de Bruxelles, un prêtre noir de Léopoldville, A. Joseph-Albert Malula – futur Cardinal, archevêque métropolitain et Père de l’Église de Kinshasa – s’opposa aux propositions de Van Bilsen, dont la trame fut : « À l’occasion du cinquantenaire (1909-1959) de l’annexion du Congo, la Belgique doit s’obliger, sans équivoque, à conduire le Congo, endéans un délai à préciser, ne pouvant dépasser 25 à 30 ans, vers le plein exercice de sa souveraineté. » .
Abbé Malula opina : L’accès à l’indépendance des pays africains devait se faire dans la tranquillité et la paix, un quart d’heure trop tôt qu’un quart d’heure trop tard »

38. Que n’aurait pu in illo tempore non suspecto servir de source d’inspiration à l’exercice de
refondation, la Doctrine Sociale de l’Église Catholique qui propose une vision réfléchie de la société ainsi que des objectifs, des principes, des valeurs et des réflexions indispensables pour la mettre réellement au service de la personne humaine » !
L’intransigeance de l’Église dans son rejet des excès, des dérapages et de l’irrationalité fut perçue par le régime politique comme une opposition farouche à son projet politico-idéologique.
Homme de grande foi et un mythique, un visionnaire, un prophète de son temps, un grand homme d’action, dont le rêve fut d’assister à la triomphale apothéose de l’œuvre belge au Congo : « Une Église congolaise dans un État congolais »., le Cal Malula et l’Église catholique n’ont pu vaincre les antagonismes récurrents avec le pouvoir politique pour pouvoir trouver un chemin de poursuivre la réalisation du bien commun du peuple dans la suite de « l’œuvre grandiose et bénéfique » (sic !) réalisée par la Belgique mais reconnue « Combat inachevé » selon le titre de l’ouvrage du ministre Paul-Henri Spaak (1969).
P. Lumumba reconnaissait les mérites de la Colonie, même quant sa voix parlait de l’Afrique du futur, de la dignité, de l’exploitation qu’il fallait combattre et de l’unité du Congo à préserver. Il disait, dénonçait et accusait : « Je ne suis rien d’autre qu’un nationaliste africain. J’utiliserai toute la puissance du Congo indépendant pour émanciper tous les autres peuples africains, à commencer par ceux de l’Afrique du Sud…Nous savons que ce pays a été construit par les Belges, les Portugais, les Grecs et d’autres colons étrangers qui ont donné le meilleur d’eux-mêmes… ».
Malheureusement, le vide laissé par les Belges ne sera point comblé par des « colons » congolais
prêts à tenir désormais la truelle, la houe, le livre comptable, la clé anglaise du mécanicien, le megger de l’électricien, ou encore, plus ambitieux, l’exploitation agro-forestière ou agroalimentaire, à la place du colon étranger, mais surtout il ne se trouvera pas d’élites préparées et animées du nécessaire élan pour concevoir un Congo nouveau selon la volonté des Congolais !

39. Concevoir un Congo nouveau tel que s-désiré par le peuple du Congo, tel est l’objet du rendez-
vous fixé dans la mouvance festive du 30 juin 1960 ! Un penseur souligne que « La destinée n’est pas le fruit du hasard mais du choix. Ce n’est pas quelque chose que l’on attend, mais quelque chose que l’on construit ».
Le Congo navigue malheureusement à vue depuis le 30 juin 1960. Il est une extrême urgence et impérieuse nécessité d’ouvrir le chantier de remise en l’endroit de la marche de construction du Congo suivant un schéma guide en adéquation avec l’approche préconisée dans la DES et esquissé comme ci-dessous, étant entendu que la démarche nationale tend à lever des options fondamentales par la personne humaine et la société civile avant que le Gouvernement soumette les analyses – des enjeux essentiels auxquels la société doit répondre et leurs implications – ainsi que les propositions au débat social et citoyen et à la décision politique.
La personne humaine du fait de sa vocation communautaire doit vivre dans le cadre de la société civile, c’est-à-dire une société ouverte au bien commun, à la démocratie, au principe de subsidiarité, de solidarité, de participation, de justice dans la charité.
Il appartient à la communauté politique d’assurer le bon fonctionnement de l’ensemble dans le cadre des institutions (personne humaine, société civile, communauté politique) dans le but de :
 s’assurer que les objectifs fixés (choix collectifs) à l’horizon donné sont en adéquation avec les
finalités communes ou préférences ; vérifier la permanence d’un ensemble de choix collectifs ;
 évaluer si les institutions politiques, économiques ou sociales qui les (les choix collectifs)
incarnent concourent effectivement aux finalités sur lesquelles la société s’accorde ;
 se demander si ces institutions ne sont pas, parfois, devenues oublieuses des objectifs qui
fondent leur existence ;
 examiner si les mêmes buts ne pourraient pas être atteints d’une autre manière, plus efficace ou
mieux adaptée à un contexte nouveau ; évaluer la cohérence des aspirations communes.

40. S’agissant des orientations générales, l’Église s’est déjà exprimée à travers la DSE sur des réalités
pratiques essentielles : la famille, le travail, l’économie, le développement (en opposition à la croissance économique ou progrès, un développement authentique, favorable à l’homme, intégral, tout l’homme et tout homme, solidaire, toute l’humanité, plénier, un humanisme ouvert à Dieu), l’écologie, la communauté politique, la communauté internationale, la paix, les droits de l’homme, la culture, la morale et la civilisation (de l’amour ).
Par ailleurs, l’exercice le plus important à mener à ce jour, c’est celui de la contextualisation des orientations générales en vue des options particulières spécifiques.
À ce sujet, considérant la trame de construction de la paix suivant le triptyque « Dialogue – Éducation Travail » du Pape François, l’Église de Congo-Kinshasa dispose d’un précieux ouvrage « Propos intempestif – Mon testament spirituel » de Hippolyte Ngimbi Nseka, prêtre séculier du diocèse de Kisantu, célébrant ses 50 ans de vie sacerdotale, dans son ministère d’Éducateur, de Pasteur ou d’homme de Culture, 1970-2020.
L’Abbé Ngimbi y analyse avec toute la pertinences et l’actualité seyantes des sujets d’intérêt majeur dont notamment, à titre illustratif :
 le déficit culturel et identitaire, et même celui spirituel et pastoral stigmatisé par exemple
dans le chef des jeunes membres du clergé congolais : la mise en cause de la formation spirituelle, intellectuelle, humaine par rapport aux valeurs chrétiennes et spirituelles d’un service voulu total et libre de Dieu et des hommes, nécessitant d’acquérir la science et la sagesse qui les préparent au meilleur service qu’on puisse rendre à un peuple, savoir l’aider à se développer matériellement et spirituellement, tant il est vrai qu’évangélisation et développement d’un peuple doivent aller de pair ; la léthargie de la part des fidèles de l’Église catholique : une sorte de démobilisation générale, effet direct des déceptions successives vécues individuellement et collectivement , du fait du peu de cas apporté à l’examen des transformations qui se sont opérées aussi bien au cours de la première que de la deuxième évangélisation ;
 l’importance pour les « missionnaires » (envoyés, religieux et religieuses) de connaître avec
plus d’ampleur l’histoire, les structures sociales et manières de vivre des peuples, d’étudier attentivement les règles morales et les préceptes religieux ainsi que les idées profondes que ceux-ci se sont formées sur Dieu, le monde et l’homme en suivant leurs traditions religieuses » ( n. 26 de Ad Gentes, décembre 1965) ;
 l’explication du drame africain et singulièrement congolais vécu dans tous les domaines,
à savoir « La personne humaine n’accède vraiment et pleinement à l’humanité que par la culture, nous rappelle le Concile Vatican II, celle-ci signifiant, dans son sens historique et social, le patrimoine moral, juridique, philosophique, religieux, spirituel, etc. Or, il se fait que l’Africain se trouve à la croisée des chemins, dans une situation ambiguë par rapport à sa propre culture. Celle-ci lui étant connue à travers d’autres systèmes de pensée qui la méconnaissent, voire la méprisent, l’Africain a lui-même appris à la mépriser, à la combattre comme un système de superstition, de magie, etc. D’où son désemparement, son déséquilibre au sein de la nouvelle société qui est désormais la sienne, suspendu qu’il est entre deux ou plusieurs systèmes apparemment et même réellement incompatibles »
 l’extrême importance de l’éducation de base comme le premier facteur de développement
« L’alphabétisation est pour l’homme un facteur primordial d’intégration sociale aussi bien que d’enrichissement personnel, pour la société un instrument privilégié de progrès économique et de développement » (Paul VI au Congrès de l’UNESCO à Téhéran, 1965). Dans sa « Lettre Encyclique sur le développement des peuples : « tout programme , fait pour augmenter la production, n’en en définitive de raison d’être qu’au service de l’homme » qui doit être rendu « capable d’être lui-même l’agent responsable de son mieux-être matériel, de son progrès moral, et de son épanouissement spirituel » Car « l’homme n’est vraiment homme que dans la mesure où, maître de ses actions et juge de leur valeur, il est lui-même auteur de son progrès, en conformité avec la nature que lui a donnée son créateur et dont il assume librement les possibilités et les exigences » … Car « la faim d’instruction, dit-il, n’est pas moins déprimante que la faim d’aliments : un analphabète est un esprit sous-alimenté. Savoir lire et écrire, acquérir une formation professionnelle, c’est reprendre confiance en soi et découvrir que l’on peut progresser avec les autres. » (cf. une note de la Déclaration Gravissimum Educationis)

41. Savoir choisir les priorités et urgences nationales est un autre défi crucial pour Congo-Kinshasa !
La situation sociale actuelle ne laisse aucune chance à l’installation d’une démocratie égalitaire. C’est à la vitesse microbienne que germe et se développe tristement une société aristocratique congolaise, à l’image de celle déjà morte en Occident, cruellement balayée par les révolutions populaires. Le Congo, comme sourd et aveugle, laisse pousser de manière vertigineuse les tentacules de « la « noblesse » insolente, aux sentiments généreux, qui s’intéresse au sort du peuple, aide les pauvres, soulage les souffrances mais se réserve la puissance politique, la culture de l’esprit et les biens matériels et ne laisse en partage à la foule que le travail moins avantageux et une instruction rudimentaire ».
L’expérience électorale nationale des années 2000, singulièrement stérile, fait douter des lendemains démocratiques. Trois cycles chaotiques – 2006, 2011, 2018 – tous désespérément inachevés ! Jamais d’élections locales et municipales ! Et donc jamais donné lieu à la mise en place de gouvernement à la base ! Cela confine à l’aveu d’impossibilité d’instaurer une démocratie véritablement représentative !
Jamais de perspective d’un horizon proche où le peuple investira de sa confiance des hommes et des femmes qu’il estime capables à travers des élections libres et sincères ? Ainsi se perpétuerait à jamais le règne des squatteurs des palais de la République ainsi que des vassaux à tous les niveaux !
Le culte de personnalité semble relever du caractère même du peuple Congolais ! D’où la ruée vers la création des partis politiques (bientôt un millier ?) avec génération spontanée et prolifération des présidents fondateurs allègrement érigés et vénérés en « autorités morales ». Pareil atavisme postule l’impossibilité d’établir une république démocratique !
En effet, au lieu de servir le vrai souverain qu’est l’État, la classe politique comme le peuple lui-même élèvent le président de la République, le premier magistrat du pays, au sommet de la hiérarchie des pouvoirs ! Cela atteste d’un grave dévoiement car, dans une république démocratique, les citoyens ne doivent pas servir le chef de l’État, mais plutôt l’État, le vrai Souverain. N’est-ce pas là encore une disposition d’esprit, un trait de de caractère du peuple Congolais ?
Faute de classes moyennes, la société congolaise est devenue un permanent face-à-face explosif entre deux groupes de populations : une minorité insolemment et dédaigneusement riche et une écrasante majorité étrangement pauvre, au passé martyr et sans présent ni avenir, incapable de subvenir au minimum vital des besoins fondamentaux.

42. La résolution ultime que les enfants de Congo-Kinshasa se doivent de prendre est celle de
décréter pour les générations présentes et à venir que « le Congo ne tombera plus ! »

Avec un peuple sans conscience politique, les dirigeants pourront continuer à se succéder sans rêve clair et travailler sans schéma réfléchi. Moyennant le pain et les jeux, comme au beau vieux temps de la Rome antique, la chose politique pourra courir au Congo-Zaïre-Congo, à la guise de tels dirigeants jusqu’à l’effondrement complet et irréversible du corps social.
Une Charte devra être élaborée pour servir à la formation du citoyen lambda comme de tout aspirant à la conquête du pouvoir politique au regard de certaines options en termes de valeurs et normes en partage :
 Le souci du bien commun et l’exigence de solidarité : les meilleures institutions ne sont efficaces que
si les dirigeants et le peuple veulent travailler ensemble au bien commun dans un esprit de confiance réciproque. Le véritable bien commun est fait d’un équilibre de droits personnels et d’obligations sociales, et en servant le bien général, les citoyens servent aussi leur propre bien.
 La volonté de réaliser le bien commun : un bon gouvernement ne suppose pas seulement, à la
direction, des hommes et des femmes intelligents et capables, mais animés de la volonté de réaliser ce qu’ils ont jugé favorable au bien commun; de même, au-delà de délibérer, de créer des lois admirables de sagesse et de prudence, des lois qui règlent tout, prévoient tout, promettent tout…il faut avoir la volonté d’arriver au but, chercher les méthodes efficaces, plier les obstacles et maintenir la discipline dans l’action. Les bons chefs du peuple sont ceux qui agissent et qui, n’ayant que peu de loisirs, ne tiennent que les assemblées nécessaires (un philosophe grec).
 Une question d’honnêteté : Celui qui gouverne doit être le plus obéissant à la loi (Socrate). À la direction
de l’État, il faut des hommes et des femmes capables et actifs, mais, de plus, qui mettent leur esprit et leur activité au service de la prospérité commune… « Il n’y a pas de dispositions légales qui tiennent contre les mœurs… Quand les dirigeants manquent d’intégrité et de probité, on ne peut remédier à aucun des maux dont souffre le pays qu’en ôtant la corruption. … Tout autre remède est, ou inutile, ou un nouveau mal… »
 Une question de travail : le progrès est lié au travail. La législation peut être sage, les institutions
bien agencées, l’inertie générale en aura vite raison. Les plus belles réformes s’enlisent dans l’apathie politique. Le devoir du travail doit occuper une première place dans l’éducation d’un peuple. Le progrès n’amène pas l’homme à travailler moins mais à travailler autrement. Il élève la qualité du travail.

43. L’Église catholique se doit par ailleurs de chercher à comprendre pourquoi, malgré ses incessantes
exhortations, il n’y a plus de place – ou peu – à la vertu et à la compétence dans la société congolaise. ! De nouvelles valeurs aux contours flous les ont supplantées. Il est devenu la règle de sacrifier l’efficacité et l’efficience de l’action de l’État, ce qui a conduit à « miner l’autorité dans son principe, soit en confiant des responsabilités à ceux qui n’en sont pas capables ou à des citoyens malhonnêtes », qui, du reste, ne devaient répondre de leurs actes qu’au seul chef de l’État, le Président « Fondateur » – entendu dans la conscience servile de ces « élus » comme fondateur des institutions officielles et de leurs animateurs désignés -. Et l’on se surprend à entendre les dirigeants à tous les niveaux, y compris à celui de chef de l’État, se plaindre avec le peuple de ce qui ne va pas dans tel ou tel autre secteur de la vie nationale, et cela au prétexte que chacun doit assumer ses responsabilités, oubliant l’importance et la nécessité du contrôle par l’autorité hiérarchique et de la sanction. « Dans un tel système, la critique publique des institutions faite par le chef de l’État et ses collaborateurs convainc difficilement, car elle donne l’air d’une démission du pouvoir ou, pour le moins, d’une confession dont on évite de tirer les conséquences. Par-là, le chef de l’État est placé dans une situation très inconfortable, car, constitué juge et partie, il ne peut sanctionner les fautes de ses subalternes qui se présentent comme ses conseillers ou de simples exécutants de ses ordres » (CEZ, Archevêques et évêques catholiques, mars 1990).
44. Une autre leçon importante de l’histoire des années 1990 : la longue transition politique des années
1990 a étalé au grand jour les plaies morales d’un pays en l’état de non-État : un gouffre sans fond où poussent allègrement toutes les antivaleurs. Au sein de la Conférence nationale souveraine, un véritable défouloir, l’intransigeance des uns et l’instinct de survie exacerbé des autres, ont fait échouer la réconciliation nationale, préalable incontournable pour tout nouveau départ. L’atmosphère de règlement de comptes, la culture de l’irresponsabilité collective et la duplicité des puissances d’argent ont été autant d’ingrédients qui ont hypothéqué les résultats de ce forum. La diabolisation à outrance, une légèreté déconcertante d’acteurs politiques qui passaient allègrement du camp mobutiste à celui de l’opposition et vice versa, l’intolérance et l’exclusion sont autant de faits qui ont conduit à un retour à la case départ ». (Ambassadeur Sampassa K.)
Depuis, cette culture de la diabolisation gratuite s’est enracinée au point d’inhiber toute possibilité de débat sur des questions existentielles.

45. Les dirigeants gouvernementaux successifs des générations (1992-2022), tous, technocrates,
responsables politiques ou hauts fonctionnaires, complètement déconnectés, obsédés par les chiffres de taux de croissance économique, ces fameux technos, dépourvus de sens politique et d’empathie, développent des discours éthérés, poussent l’outrecuidance ou l’ignorance inconsciente, c’est selon, jusqu’à chanter les mérites factices de leur gestion performante sans résultats probants et même promettre l’émergence de RD Congo au moment celle-ci est enfouie dans les bas-fonds des classements des performances socio-économiques, ce que Albert Yuma (président du patronat congolais) raillait souvent et solennellement, à juste titre : « l’aveuglement technocratique fait croire, parfois, qu’une mesure est bonne parce que rationnelle » ! Qu’ils apprennent à éprouver de la honte pour eux-mêmes et qu’ils adoptent un profil bas afin d’arrêter d’irriter les élites résistantes et résilientes silencieuses jusque-là mais et qui pourraient leur rabattre rudement le caquet pour leur plus grand déshonneur !

46. Le Congo s’est mué en un immense champ de théâtralisation dramatique de la vie nationale.
Serait-ce excessif de postuler que la communauté nationale comme les nations du monde entier regardent tantôt stoïquement tantôt cyniquement le corps social congolais s’écrouler par délitescence et pourrissement, jusque dans les abysses de l’opprobre et de l’indignité en ces années 2020 ? Que les uns se calfeutrent sous une chape d’inconscience et de cynisme ou de débonnaireté et les autres dans une indifférence non simulée et empreinte d’une affectation dédaigneuse ? La société congolaise est gravement minée suite à une conjonction massive des facteurs de décadence sur fond de l’exacerbation d’une crise à l’ampleur et à la complexité sans précédent : une dissolution effrénée des mœurs, une banalisation éhontée de la corruption à tous les niveaux et dans tous les secteurs et domaines de la vie nationale.
Que toutes les forces vives réagissent au mieux de leurs capacités pour conjurer le funeste spectre de l’effondrement de la nation !

47. Il importera de commencer par un programme de déclics de confiance. Plus les membres d’une
société sont culturellement divers, plus celle-ci doit veiller à la clarté des règles communes et à l’équité dans leur mise en œuvre ; plus une société est marquée par l’inégalité, plus les services publics doivent être les garants effectifs de l’égalité d’accès aux biens fondamentaux ; plus elle se vit comme disparate, plus il lui faut produire du lien social ; plus elle est travaillée par des tensions, plu selle doit avoir confiance en ses institutions politiques, en leur aptitude à définir le bien commun et en leur capacité à le faire respecter.

48. Un avertissement au peuple qui attend des élections : « Une nation fatiguée de longs débats
consent volontiers qu’on la dupe, pourvu qu’on la repose, et l’histoire nous apprend qu’il suffit alors pour la contenter de ramasser (sic !) dans tout le pays un certain nombre d’hommes obscurs ou dépendants (sous le contrôle des autorités morales !), et de leur faire jouer devant elle le rôle d’une assemblée politique, moyennant salaire. (A. de Tocqueville)
Haro sur des inutilités de la « démocratie cosmétique » ! Construisons une démocratie de l’humilité et du respect au moyen d’élections réellement bonnes et utiles ! Regardons les doutes suscités dans le monde par les mouvements révolutionnaires de remise en question de la démocratie dans des nations occidentales enracinées dans la pratique démocratique
: « En ces temps de trouble et de désordre, à un moment où tous (sic !) les gouvernements démocratiques sont contestés, attaqués, vilipendés, renversés, il est facile de dresser un réquisitoire contre la démocratie telle qu’elle est pratiquée presque partout dans le monde. Les électeurs ne doivent s’en prendre qu’à eux-mêmes si leurs parlements et leurs gouvernements sont incapables de se concentrer sur ces enjeux majeurs ; si leurs dirigeants ne sont pas à la hauteur de ces formidables défis et ne sont trop souvent que des marionnettes médiatiques. Ce sont eux qui les ont choisis. Et ce n’est pas en les remplaçant par des clones plus à droite ou plus à gauche qu’on y changera quelque chose. Et pas non plus en remplaçant des élus de la démocratie représentative par des dictateurs, ou par des dirigeants au sort, qu’on recréera le lieu éthique et moral dont les communautés humaines manquent tant aujourd’hui. Pour y parvenir, il faudrait que, dans chaque collectivité humaine, les dirigeants soient choisis sur leurs capacités de comprendre les mouvements du monde, d’incarner la grandeur commune, de dire la vérité, de ne pas flatter les plus bas reflexes, d’écouter, de respecter, d’apprendre, de changer d’avis, de faire confiance, d’aider, d’encourager, de s’émerveiller, d’admirer, avec humilité et empathie. Les pays qui réussiront à choisir durablement ce genre de gouvernants retrouveront le chemin de la croissance et de la sérénité » (Jacques Attali)
Les représentants ne sont presque jamais ceux choisis par le peuple mais plutôt systématiquement cooptés et imposés par la tyrannie au mépris de la volonté du corps électoral et le rapport ne sera pas inversé de sitôt puisque les élections demeureront encore truquées ou simplement confisquées…
Diocèse de Kisantu – Paroisse Saint Jean-Apôtre, le XXX Janvier de l’an de grâce MMXXIII

Johannes Ludovicus Bongungu

Guetteur de la Nation RD Congo